samedi 31 octobre 2015

Dans la tourmente

Jamais deux sans trois: après avoir enchaîné deux films japonais d'époques différentes, j'ai été tenté d'en voir un troisième d'affilée. L'idée que ça me permette de boucler un mini-cycle m'a plu. J'ai choisi ensuite un vieux long-métrage: Je ne regrette rien de ma jeunesse. D'un Kurosawa à l'autre, c'est une sorte de clin d'oeil, même si Kiyoshi et Akira ne sont pas apparentés. Et à l'arrivée, beaucoup de plaisir...

Je ne regrette rien de ma jeunesse m'a bluffé, littéralement. L'envie d'aborder un Akira Kurosawa qui ne soit pas un film de samouraïs était bonne: j'ai a-do-ré ce mélodrame, classique mais pas banal. L'homme qui tient ici la caméra et co-signe le scénario n'a pas 40 ans. Pourtant, en portant le regard quelques années en arrière, il trouve dans l'histoire récente de son pays des événements qu'il juge dignes d'être racontés. Début de la décennie 1930: l'impérialisme japonais pousse l'archipel à entrer en collision avec la Chine. Des universités s'enflamment et contestent la légitimité de l'autorité de l'armée. Quelques jeunes gens, la belle Yukie et ses amis, sont aussitôt pris dans la tourmente qui se généralise, chacun sur une position politique différente. La première qualité du film est là, dans cette évocation subtile de faits réels, sans manichéisme ni complaisance. C'est beau !

Ces vieilles images m'ont également plu pour deux autres raisons. D'abord, je me dois de le préciser: elles constituent une fresque historique. Le scénario avance en effet dans le temps et marque donc des étapes, cruciales, un peu avant le début de la seconde guerre mondiale sur le sol européen, puis en 1941 et 1945. D'autres jalons importants de l'histoire du Japon sont ainsi évoqués, comme l'attaque aérienne sur la base américaine de Pearl Harbor ou la capitulation finale. Par ailleurs, j'ai été très sensible à une décision étonnante prise par le scénariste et réalisateur: avoir confié le tout premier rôle au personnage féminin ! Nous sommes en 2015 et le milieu du cinéma se voit encore régulièrement taxé de machisme: il y a là des leçons d'ouverture d'esprit à prendre pour les mecs trop sûrs de leur talent. Si romanesque soit-il, Je ne regrette rien de ma jeunesse s'affiche avant tout comme un film libre, apte à bousculer bien des préjugés. Qu'il soit sorti dans les salles japonaises un an à peine après la paix retrouvée, c'est fort, quand même ! Ce peuple m'étonnera toujours...

Je ne regrette rien de ma jeunesse
Film japonais d'Akira Kurosawa (1946)
Une demi-étoile "bonus" pour saluer la belle audace du scénario ! Ami(e)s amateurs du 7ème art nippon, il se peut que d'autres oeuvres japonaises arrivent très prochainement sur ces pages. Il est certain que j'ai encore bien des choses à découvrir de ce côté de la planète cinéma. Aux non-initiés, je recommande volontiers Voyage à Tokyo. Setsuko Hara (Yukie) y tient un autre rôle puissant. J'en reparlerai...

6 commentaires:

Pascale a dit…

Il y avait une rétrospective à Lyon et je n'ai pu qu'en voir un. Celui-ci m'aurait beaucoup plu.

Martin a dit…

Je pense, oui. J'espère que tu auras une occasion de le voir à une autre occasion.

Anonyme a dit…

Hello, je partage ton appréciation du film que j'ai enfin découvert et que je viens de chroniquer chez moi. :)

Strum

Martin a dit…

Hé, Strum ! Sympa d'être passé par mes archives pour mettre un mot ici ! Je viendrai te lire prochainement, promis.

Anonyme a dit…

Ben alors, j'attends toujours que tu viennes me lire ! ;) (mais peut-être l'as-tu fait sans commenter)

Strum

Martin a dit…

Hé hé... j'arrive !