vendredi 21 janvier 2011

Une déferlante explosive

Une chronique de Silvia Salomé

1991. Une belle vague envahit nos salles de cinéma : Point break - à la version québécoise Extrême limite, la France préfèrera très vite le titre original. Aux commandes de ce film, Kathryn Bigelow qui voue une véritable passion à l’océan et à son univers, avec son compagnon de l’époque, James Cameron (producteur non crédité du film). Devant la caméra, on retrouve un Patrick Swayze sexy en diable, et un jeune premier qui n’est autre que Keanu Reeves.

La réalisation de miss Bigelow est époustouflante: les scènes d’action suivent les moments de tension. Ce film est un pur shoot d’adrénaline ! Seuls répits: les moments de contemplation face à l’océan ou encore les ralentis de la caméra qui nous font apprécier des paysages désertiques ou encore l’immensité du ciel ! En effet, on est troublé, lorsque Johnny Utah, incarné par le fougueux Keanu Reeves, découvre les sensations du surf nocturne. Il a l’impression de communier avec l’océan. Il est clair que lorsqu’on a mis une fois ses pieds dans un océan, si on l’a respecté, s’il ne nous a pas rejeté(e), c’est une longue histoire d’amour qui commence. Bien sûr, si cette expérience vous est étrangère, vous passerez sans aucun doute à côté d’une partie du film, certainement la plus philosophique et la plus mystique, enfin pour tous les aficionados de l’océan, dont je fais partie !

Car à côté du film policier, c’est un vrai cri d’amour à la nature que nous propose Kathryn Bigelow. Dès qu’on passe à l’eau, dans le ciel ou sur terre, elle nous montre la beauté de notre environnement. Comment ne pas le respecter ? Il est vrai que dans l’imaginaire collectif, les surfeurs sont de fervents défenseurs de la nature. Alors quels meilleurs hérauts que les dompteurs des vagues pour faire passer ce message ?

Bien sûr, il faudra fermer les yeux sur quelques incohérences. Encore que... nos personnages sont des êtres humains, il est logique qu’ils se contredisent ! Le plus bel exemple, c’est le personnage de Bodhi auquel Patrick Swayze donne magistralement vie. Côté pile, Bodhi est un beau gosse: blond, les yeux bleus, la barbe de trois jours. Il surfe comme un dieu. Il a une mentalité qui fait de lui un super pote et un amant très sollicité ! Lors d’une soirée, il dit sans complexe à Johnny, son protégé: «Tout ce qui est à moi est à toi. Fais comme chez toi !» Côté face, c’est un être bien plus obscur: il prône la non-violence, et pourtant, il terrorise les employés de banque, n’hésite pas à faire enlever son ex-petite amie, se bat fièrement pour défendre ou son territoire ou son ami (dans ce cas précis, on le félicite). Ou encore, il critique ses concitoyens «qui s’entassent dans des cercueils en métal aux péages» alors que lui utilise les phares des pick-up de sa bande pour éclairer le feu de camp de la plage !

Johnny est aussi un personnage très duel car il se retrouve au milieu du trio infernal: passion, amour, amitié. Comment concilier les trois, surtout quand on est un agent fédéral, ou plutôt une nouvelle recrue du FBI du bureau de la Cité des Anges ? Je crois qu’il ne parviendra jamais à le faire. Il ira contre les règles pour venir en aide à celle qu’il aime. Il ne pourra jamais se résoudre à arrêter Bodhi, son mentor. Il lui cèdera encore lorsque le gourou le suppliera : «Laisse-moi juste une vague». Tout comme il ne pourra jamais raccrocher sa planche. Arrivé en retard à son boulot, il lance à son supérieur: «J’ai chopé une déferlante d’enfer ce matin, chef !» À la fin du film, on voit aussi que son personnage a changé de look: tout de jeans vêtu, il s’est laissé pousser les cheveux. Je vous le disais: quand on goûte à l’océan, on ne peut plus s’en passer ! Son geste le plus fort: jeter sa plaque à l’eau en pleine tempête !

Mais ces deux personnages sont très attachants: Bodhi, on a envie de tout lui pardonner. Quoi de plus normal pour un surfeur que de vouloir surfer les meilleurs spots au monde ? Vous me direz qu’il y a d’autres moyens ! C’est sûr. Je vais être l’avocat du diable: ces braquages se font toujours sans effusion de sang (enfin presque !). Et puis rappelez-vous: le surf ne s’est professionnalisé que dans le courant des années 90. Avant Kelly Slater qui a rendu ce sport ultra-populaire, le surf était un milieu très marginal. Les sponsors ne se bousculaient pas au portillon ! Il fallait une solution, la bande à Bodhi a choisi de s’attaquer à un spectre du capitalisme: braquer des banques, vingt-six en trois ans, affublés des masques des anciens présidents des États-Unis, Reagan, Carter, Nixon et Johnson ! Et Johnny nous émeut par sa naïveté, due à son jeune âge, mais aussi par son idéalisme. On a sans cesse envie de lui dire de faire attention à lui, de ne pas trop s’attacher…

Sachez que si ces rôles sont aussi criants de vérité, c’est grâce à leurs interprètes. Par exemple, pour la scène de la chute libre, Patrick Swayze ne s’est pas fait doubler. C’est une discipline sportive qu’il pratiquait. Son corps d’Apollon et ses gestes gracieux sont l’heureuse conséquence des années qu’il a passées sur les parquets des studios de danse. Keanu Reeves, lui, s’est un peu plus préparé physiquement: il a eu la chance d’observer de vrais agents du FBI de Los Angeles en action. Et pour peaufiner son jeu de footballeur américain, des entraîneurs de la prestigieuse université UCLA lui ont dispensé des cours !

Point break
Film américain de Kathryn Bigelow (1991)

Ce film a très nettement marqué son époque, il a aussi très facilement passé le cap de la postérité. Il a permis aux profanes de s’immiscer dans le milieu du surf. Aujourd’hui, il est culte ! Aux MTV Awards, Reeves a été sacré meilleur acteur face à Swayze, qui été aussi nominé. Des années plus tard, en France, on rend hommage à ce surf movie. D’abord dans la cultissime Cité de la peur des non moins cultes Nuls. Alain Chabat reprend une scène, celle où Johnny loupe (volontairement) sa cible et vide son chargeur en tirant en l’air. Plus tard encore, Jean Dujardin, alias Brice de Nice, fait de Bodhi, son unique source d’inspiration dans la vie, allant jusqu’à voir plus de mille fois le film !

1 commentaire:

Mokona a dit…

On m'a souvent parlé de ce film comme un incontournable... je crois qu'il va vraiment falloir que je m'y mette ^_^