Une chronique de Martin
Enoch est tombé dans le coma après un grave accident de voiture. Quand il finit par se réveiller, il apprend que ses parents sont morts. Annabel doit subir un scanner pour surveiller l'évolution de sa maladie et sait que sa tumeur au cerveau devrait l'emporter dans trois mois environ. L'idée originale de Restless ne laissait aucune vraie place aux emphases balourdes. Entre pathos exacerbé et détachement exagéré, il était difficile de trouver le ton juste et d'ainsi pouvoir mettre en valeur cette histoire. Gus van Sant - que j'ai découvert avec ce dernier film, enfin ! - y est à mon avis assez bien parvenu.
Au départ, pourtant, voir Enoch assister à diverses cérémonies funéraires surprend. Quand, d'un joli et large sourire, Annabel entre en scène, l'idée que ces deux-là vont s'entendre et s'aimer s'impose aussitôt. La magie de Restless tient au fait qu'à partir d'un thème éminemment mélodramatique, le réalisateur ne tombe jamais franchement dans le piège du larmoyant. Mieux que ça, ce film ose parfois prendre à contre-pied, la scène triste la plus caricaturale n'étant ainsi rien d'autre qu'une fausse piste - à laquelle est associé un rebondissement. Bien que classique, la trame reste imaginative.
Tout me semble tenir en un seul mot: préparation. Au moment précis où Annabel évoque sa fin prochaine, Enoch ne part pas en courant et, tout au contraire, lui promet d'utiliser le temps encore disponible pour la préparer à partir en douceur. Dans cette démarche, il est secondé, épaulé même, par Hiroshi, un fantôme de pilote kamikaze nippon, dont on ne sait jamais vraiment s'il est réel ou imaginé. Annabel, de son côté, se sait condamnée et il y a alors un moment dans le film où le couple bascule: ce sera elle, ensuite, qui préparera son aimé à survivre à un second deuil. Restless dit finalement beaucoup de choses sans en faire jamais trop. En un instant fugace où il est donné lecture d'une lettre, j'ai regretté de ne pas entendre parler japonais, mais c'est mon unique bémol sur la forme qu'adopte le long-métrage. Retenue et pudeur sont ses premières qualités.
Restless
Film américain de Gus van Sant (2011)
Présenté à Cannes en sélection Un certain regard, le long-métrage est donc mon premier Gus van Sant. Il m'a donné envie d'en voir d'autres et ça tombe bien: j'en ai quelques-uns dans ma collection. Puisqu'il est ici question de deuil, je crois judicieux de vous renvoyer vers Departures pour une comparaison de l'appréhension de la mort selon les pays. J'en termine avec un mot sur les acteurs: déjà aperçue au cinéma, notamment dans Alice au pays des merveilles ou Tout va bien ! The kids are all right, Mia Wasikowska s'affirme petit à petit comme la jeune comédienne qui monte. Premier rôle masculin, Henry Hopper, fils de Dennis, débute à peine et me semble lui aussi prometteur. À voir et revoir, donc, mais sans se tromper. Deux autres films portent en effet le même nom que celui-là...