J'ai hésité, tergiversé, atermoyé... et finalement, mon dictionnaire des synonymes ne m'aura pas empêché d'aller voir Twist à Bamako. Robert Guédiguian, une fois n'est pas coutume, est sorti de Marseille et a laissé Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin et Gérard Meylan en France pour aller tourner en Afrique ! De quoi me rendre curieux...
Les très nombreuses questions actuelles liées à la présence de l'armée française au Mali et à son retrait programmé ont bel et bien achevé de me convaincre de m'intéresser à cet opus. Nous sommes en 1962 et l'immense pays d'Afrique de l'Ouest est désormais indépendant. Soucieux d'autonomie, son gouvernement veut remplacer le système des chefferies hérité de la colonisation par un régime socialiste strict, avec l'État à la tête de toutes les activités et une redistribution égalitaire entre tous ceux qui créent de la richesse - et ce sans aller jusqu'à copier les modèles russe ou chinois, présumés totalitaires. Twist à Bamako oriente alors notre regard vers un jeune homme idéaliste, Samba, persuadé que ses grandes pensées collectivistes permettront au peuple de jouir ENFIN de la plus complète liberté. Cette liberté que le film illustre notamment par l'ouverture de clubs permettant à chacun(e) de boire et danser jusqu'au bout de la nuit. Extrêmement populaires, ils seront bientôt décriés par un système soucieux d'orthodoxie économique et de rééducation de la jeunesse...
Il est bien difficile, devant ce film, de ne pas (re)penser au Mali d'aujourd'hui et d'oublier qu'il a été tourné... à Thiès, deuxième ville du Sénégal, pour des raisons de sécurité. J'ai lu certaines critiques négatives à l'égard de ce choix, au motif qu'il donnerait de la capitale malienne une pâle copie de ce qu'elle était au début des années 60. D'aucuns pointent en outre divers anachronismes, dans les choix d'accompagnement musical, notamment. Je peux certes concevoir que la reconstitution soit imprécise, mais cela ne me choque pas. Comme de fait tant d'autres films du même auteur, Twist à Bamako nous parle de l'élan d'une jeunesse vers plus de liberté et de justice sociale, en brossant large, mais sans oublier pour autant les espoirs individuels de chacune et chacun des protagonistes. Quelques scènes maladroites ne sauraient occulter un message fort, qui, à mon sens, concerne la France autant que le Mali, l'Europe autant que l'Afrique. Robert Guédiguian, homme de gauche, est aussi un poète: sa façon de nous parler d'amour est ici particulièrement poignante. À (re)voir !
Twist à Bamako
Film français de Robert Guédiguian (2022)
Le cinéaste marseillais a aussi bénéficié ici de l'apport de producteurs italiens, canadiens et sénégalais. Son propos évite tout manichéisme outrancier et m'a donc fait réfléchir bien après la séance. Sa vision historique est aussi intéressante que dans L'armée du crime (2009). Pour regarder l'Afrique en face, Félicité et Lingui méritent d'être vus. Mais, cette fois, j'ai surtout repensé à Timbuktu. Le Mali, toujours...
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Un dernier mot de remerciement...
Je veux l'adresser à Pascale, l'une des personnes qui m'ont convaincu d'aller voir ce film précieux. Le dernier jour - et à la dernière séance !
Les très nombreuses questions actuelles liées à la présence de l'armée française au Mali et à son retrait programmé ont bel et bien achevé de me convaincre de m'intéresser à cet opus. Nous sommes en 1962 et l'immense pays d'Afrique de l'Ouest est désormais indépendant. Soucieux d'autonomie, son gouvernement veut remplacer le système des chefferies hérité de la colonisation par un régime socialiste strict, avec l'État à la tête de toutes les activités et une redistribution égalitaire entre tous ceux qui créent de la richesse - et ce sans aller jusqu'à copier les modèles russe ou chinois, présumés totalitaires. Twist à Bamako oriente alors notre regard vers un jeune homme idéaliste, Samba, persuadé que ses grandes pensées collectivistes permettront au peuple de jouir ENFIN de la plus complète liberté. Cette liberté que le film illustre notamment par l'ouverture de clubs permettant à chacun(e) de boire et danser jusqu'au bout de la nuit. Extrêmement populaires, ils seront bientôt décriés par un système soucieux d'orthodoxie économique et de rééducation de la jeunesse...
Il est bien difficile, devant ce film, de ne pas (re)penser au Mali d'aujourd'hui et d'oublier qu'il a été tourné... à Thiès, deuxième ville du Sénégal, pour des raisons de sécurité. J'ai lu certaines critiques négatives à l'égard de ce choix, au motif qu'il donnerait de la capitale malienne une pâle copie de ce qu'elle était au début des années 60. D'aucuns pointent en outre divers anachronismes, dans les choix d'accompagnement musical, notamment. Je peux certes concevoir que la reconstitution soit imprécise, mais cela ne me choque pas. Comme de fait tant d'autres films du même auteur, Twist à Bamako nous parle de l'élan d'une jeunesse vers plus de liberté et de justice sociale, en brossant large, mais sans oublier pour autant les espoirs individuels de chacune et chacun des protagonistes. Quelques scènes maladroites ne sauraient occulter un message fort, qui, à mon sens, concerne la France autant que le Mali, l'Europe autant que l'Afrique. Robert Guédiguian, homme de gauche, est aussi un poète: sa façon de nous parler d'amour est ici particulièrement poignante. À (re)voir !
Twist à Bamako
Film français de Robert Guédiguian (2022)
Le cinéaste marseillais a aussi bénéficié ici de l'apport de producteurs italiens, canadiens et sénégalais. Son propos évite tout manichéisme outrancier et m'a donc fait réfléchir bien après la séance. Sa vision historique est aussi intéressante que dans L'armée du crime (2009). Pour regarder l'Afrique en face, Félicité et Lingui méritent d'être vus. Mais, cette fois, j'ai surtout repensé à Timbuktu. Le Mali, toujours...
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Un dernier mot de remerciement...
Je veux l'adresser à Pascale, l'une des personnes qui m'ont convaincu d'aller voir ce film précieux. Le dernier jour - et à la dernière séance !
Oh de rien. Vraiment ravie que tu aies aimé ce TRÈS beau film politique, romanesque et romantique. Avec deux merveilleux acteurs et l'Afrique si belle où que le film ait été tourné.
RépondreSupprimerJ'espère que tu as jeté un oeil sur le travail du photographe Malick Sidibé. C'est très beau et Guédiguian s'en est vraiment inspiré.
J'insiste ! Mais merci pour ton humilité partageuse, on va dire...
RépondreSupprimerOui, c'est un très beau film... et une vraie bouffée d'oxygène dans la filmo de Guédiguian. J'aime beaucoup ce réalisateur et sa troupe habituelle, mais un peu de nouveauté pourrait revivifier son cinéma. Une belle confirmation de son talent multiple.
Oui, j'ai regardé quelques photos de Sidibé. Un travail remarquable (et j'imagine précurseur).
Et bien je prends :-) il est vrai que mon blog a comme but premier de donner envie. Je parle de moins en moins des films que je n'aime pas.
RépondreSupprimerJ'avoue que parfois quand je vois que c'est la troupe Guédiguian qui sévit je soupire un peu, et finalement il parvient toujours à me surprendre etbme cueillir. Mais cette fois c'est particulièrement réussi.
Je vois aussi que tu as repris une vraie régularité dans l'écriture: ça fait plaisir ! Et tu as bien raison de défendre en priorité les films que tu préfères, quitte à choisir.
RépondreSupprimerJ'ai découvert Guédiguian avec "Marius et Jeannette", l'année de sa sortie. Ensuite, sauf oubli, je n'ai rien vu d'autres avant "L'armée du crime" (ce qui fait un trou de douze ans !). Mais aujourd'hui, même si certains films me déçoivent un peu, je considère que c'est un personnage important du cinéma français. Je suis convaincu que tu seras d'accord sur ce point.
Je partage comme vous un avis positif sur le film. Je n'ai rien lu dessus dans la presse et j'ignorais les critiques qui lui ont été adressées. Là encore, rien ne m'a heurté dans le film, ni musique, ni reconstitution possiblement maladroite... Et il est dans les intentions de Guédiguian de faire le parallèle avec le Mali aujourd'hui, sortie tout à fait opportune d'un point de vue politique puisque E. Macron a décidé de retirer les troupes françaises après 10 ans de pas grand chose.
RépondreSupprimerJe suis tout à fait d'accord: le film tombe à point nommé dans l'actualité "diplomatique" française. Les opinions très à gauche de Guédiguian (intelligemment atténuées, me semble-t-il, dans ce "Twist à Bamako) l'empêchent de faire l'unanimité. Mais ça, ça n'est sûrement pas dans ses intentions.
RépondreSupprimerBonjour Martin, j'ai loupé ce film et je le regrette. Une de mes collègues a adoré ce film. Ton billet me fait regretter de ne pas l'avoir vu. Bonne journée.
RépondreSupprimerJe comprends ta frustration, Dasola, et je suis désolé si je l'amplifie.
RépondreSupprimerDis-toi que tu auras tout loisir de retrouver le film dans quelque temps, même si ce n'est pas sur grand écran.
Belle journée à toi !