lundi 10 avril 2023

Premières images

Il a tant enchanté d'enfances et d'adolescences que je trouve légitime qu'il ait souhaité nous intéresser aux siennes. Et il l'a bien sûr fait comme à chaque fois: en utilisant le cinéma. Je constate cependant que l'éternel artisan des images qu'est Steven Spielberg, 76 ans révolus et des dizaines de films, a aussi modifié le nom de sa famille.

J'y vois de la pudeur, une humilité consubstantielle à un brave homme qui pourrait pourtant, compte tenu de ses très nombreux triomphes passés, se tenir au-dessus de la mêlée et/ou enfin ne plus travailler. Or, au contraire, le voilà qui se décide à nous raconter les origines lointaines de sa vocation de cinéaste. Et The Fabelmans de revenir jusqu'aux sources, à l'heure précise où le train de la banalité commence à dérailler. Nous, spectateurs, sommes assis à la table d'une famille, que le père embarque bientôt vers d'autres horizons pour suivre, lui, la voie de sa brillante carrière de jeune ingénieur. Bientôt, on devinera que le fils va lui préférer un tout autre chemin...

The Fabelmans
n'est pourtant pas le récit univoque d'un créateur génial cherchant à s'émanciper de la figure paternelle. Ou peut-être que si, mais pas seulement: c'est d'abord, je crois, un film d'amour. Voyez par vous-mêmes toutes les déchirures et soubresauts intimes que va traverser cette famille: ils sont proches de ceux que l'auteur de cette histoire a vécus. La grâce absolue de ce (très beau) récit tient à ce que sa portée soit à mon sens universelle - ou partagée. Steven Spielberg nous parle de lui et des siens, mais aussi... de nous. Jamais il ne présente sa famille comme l'unique exemple à suivre. Mais il nous révèle que ce qui lui arrive est en fait... très "ordinaire" !

C'est ainsi qu'au cinéma comme dans la vie, la mère devient figure centrale. Une mère présentée comme une fée, mais soudain entrée dans une lumière crue et qui devient femme faillible, imparfaite jusque dans ses vrais engagements pour celles et ceux qu'elle aime. C'est ce qu'illustre Steven Spielberg: nous ne sommes pas des anges et pourtant, nos fragilités ne font pas toujours de nous des monstres. Est-ce une simple question de choix ? Je n'en suis pas sûr, à vrai dire. Ce que je sais, c'est juste que The Fabelmans m'y aura fait réfléchir de manière apaisée, en l'absence d'autres scènes violentes que celle d'une rupture qui, soudain, anéantit ce qu'il restait d'unité familiale...

Autant vous le confirmer: The Fabelmans contient son lot de scènes émotionnelles. Et, oui, la musique du grand John Williams les souligne d'un trait supplémentaire, sans jamais nous mener vers le pathos. Cela tient à peu de choses, parfois, et je dirais en fait à une magie propre à Steven Spielberg, à sa manière d'envisager aussi le cinéma comme oeuvre de groupe. D'ailleurs, je n'ai pas énuméré les acteurs sur lesquels il s'appuie ! Les principaux - le jeune Gabriel LaBelle, Michelle Williams, Paul Dano, Seth Rogen - sous tous vraiment bien. J'éviterai à présenter de détailler les clins d'oeil qui parsèment le film jusqu'à sa toute fin, deux heures et demie après la première image. Je veux conclure par un constat: celui d'une grande salle muette pendant toute la projection et où le public a regardé la quasi-totalité du générique de fin sans bruit, agitation ou rallumage de téléphone. Un temps "suspendu" qu'à mon sens, seule la salle obscure peut offrir.

The Fabelmans
Film américain de Steven Spielberg (2022)

Oui ! Avant que l'émotion redescende, j'ai tenu à donner cette note maximale, fruit justement de ce que j'ai ressenti à la fin, le sourire format XXL, avant que la lumière se rallume sur un public conquis. C'est la première fois que cinq étoiles ornent un film tout juste arrivé dans ma cinéphilie. Je ne vois pas ce que je peux vous dire de plus ! Si ce n'est que je continuerai à fréquenter ce cinéma très personnel...

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En attendant d'y revenir...

Je vous propose d'aller découvrir l'avis des autres: Pascale, Dasola, Princécranoir et/ou Strum. De quoi introduire aussi quelques nuances.

10 commentaires:

  1. Aucun doute c'est lui le roi du monde !
    Indépassable cette année.

    Pour l'instant, suivi de près par La famille Asada.

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  2. Oui, si je devais arrêter mon top 2023 aujourd'hui, il serait sûrement en tête.

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  3. Une merveille, ce film (et je ne dis pas ça parce que je dois à Mr Spielberg quelques-unes de mes plus belles émotions au cinéma).

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  4. Hé, Laurent ! Si tu repasses par là, raconte-nous ce qui t'a le plus plu !

    Steven Spielberg est sans doute le réalisateur emblématique de notre génération.
    Ce film, je crois que c'est un nouveau beau cadeau. Et l'occasion de le remercier.

    Je suis vraiment curieux de ce qui va arriver ensuite...

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  5. Hello. Tout aussi enthousiaste que vous trois, et beaucoup d'autres. Tout y est. Bravo. A +.

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  6. Hello Eeguab ! Oui, il semblerait que ce film ait créé une quasi-unanimité pour le soutenir.
    Les Oscars, eux, l'ont franchement oublié. Même pas une petite statuette de "consolation"...

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  7. Hello Martin : c'est simple, j'ai TOUT aimé dans ce film. De son esthétique à sa réalisation en passant par son interprétation, cette histoire qui nous raconte la naissance d'une passion et la puissance du cinéma m'a paru synthétiser l'immense carrière de Spielberg.
    C'est beau, c'est touchant, c'est fort.

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  8. Voilà qui a le mérite d'être clair ! Je te remercie d'être repassé, l'ami !
    Tu as tout à fait raison: d'une certaine façon, on peut considérer le film comme une synthèse.

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  9. J'ai beaucoup aimé ce film tout comme vous. Mais, c'est le genre de film qui m'effraie un peu quand il s'agit d'en tirer un texte. Il dit tout de la force du cinéma et nous y fait croire. C'est beau et magique et pourtant rien de fantastique là dedans. Les personnages sont aimants et aimables. Superbe.

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  10. Ce film fait une très large unanimité, j'ai l'impression, même si j'ai lu quelques mauvaises critiques et même si le succès en salles est très relatif. Même pas 900.000 entrées en France: ce n'est pour l'heure que le 27ème rang des Spielberg dans notre beau pays...

    Merci, Benjamin. Peut-être qu'à te lire, certains qui passeraient par là et hésitent encore franchiront le pas.

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