Je n'étais encore jamais entré dans l'univers d'Emmanuel Mouret. J'avais pourtant entendu d'assez bonnes choses sur plusieurs des films de ce cinéaste de 48 ans, prompt, paraît-il, à se mettre en scène dans des comédies douces-amères. Son nouveau film, Mademoiselle de Joncquières, sort de ce cadre... et nous ramène au 18ème siècle.
Quelques décennies avant la Révolution, Madame de la Pommeraye profite seule de la vie de château, après le décès prématuré d'un mari qu'elle n'aimait guère. Elle apprécie la compagnie d'un ami, le marquis des Arcis, mais ne cède à aucune des avances de ce libertin notoire. Jusqu'au jour où, après des mois d'une cour assidue, ledit marquis obtient ce qu'il veut... et se lasse finalement de la nouvelle relation qui s'est installée (je vous passe les détails, hein ?). Son chagrin dépassé, Madame de la Pommeraye pourra-t-elle être la vengeresse implacable de toutes les femmes opprimées ? Il me semble en réalité que ce n'est pas tout à fait le sujet du film. D'accord, le scénario tourne d'abord autour du prix que le marquis des Arcis devra payer pour son énième infidélité et au terme d'un redoutable complot ! Pourtant, Mademoiselle de Joncquières - du nom de celle qui sera peut-être l'instrument de la justice féminine - pourrait surprendre celles et ceux qui avaient cru au récit d'un règlement de comptes. Cela se tient, bien sûr, mais le film, très subtil, a d'autres facettes...
D'un point de vue visuel, le contrat est respecté: dans des décors intérieurs et extérieurs très soignés, il semble que les personnages évoluent naturellement, un peu comme s'ils étaient dans leurs habits de tous les jours. Les costumes sont d'ailleurs d'une grande beauté ! Cela dit, c'est d'abord à l'oreille que Mademoiselle de Joncquières séduit, grâce à des dialogues ciselés dans une langue très soutenue. Rassurez-vous: cela reste très compréhensible. Sans avoir encore pris le temps de chercher la réponse, je me suis demandé si ce français parlé était celui de l'époque, celui d'Emmanuel Mouret, une version hybride ou une réinterprétation des mots de Diderot - le tout premier à avoir raconté cette histoire, dans Jacques le fataliste, dès 1765. Quoi qu'il en soit, je veux saluer ici la belle performance des actrices et acteurs, habiles avec ces jolis mots et ces structures complexes. Cécile de France m'a bluffé, une fois encore ! Plus jeune, Alice Isaaz reste un peu en retrait: son rôle l'exige, mais elle ne démérite pas. Quant à Édouard Baer, il est comme chez lui. Bref, je me suis régalé !
Mademoiselle de Joncquières
Film français d'Emmanuel Mouret (2018)
Un petit bonheur, raffiné et piquant ! Le brave Choderlos de Laclos inspire plusieurs critiques, qui comparent cet élégant long-métrage aux adaptations cinéma de ses oeuvres incendiaires: Les liaisons dangereuses (Stephen Frears /1988) et Valmont (Milos Forman /89). Moi, je me suis souvenu de Portrait de femme (Jane Campion /96) ou du nanar Sexe intentions (Roger Kumble /99). Très dispensable...
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Une petite anecdote...
Grâce à l'amie Dasola, j'ai également appris que le texte de Diderot avait fait l'objet d'une première adaptation au cinéma, un film sorti en 1945 et de Robert Bresson: Les dames du bois de Boulogne. Désavoué par son auteur, il est transposé à la période contemporaine.
Et des liens pour la route...
Vous retrouverez donc le film du jour chez Dasola... et chez Pascale. Pour d'autres avis masculins, la lecture Strum et Benjamin s'impose.
Quelques décennies avant la Révolution, Madame de la Pommeraye profite seule de la vie de château, après le décès prématuré d'un mari qu'elle n'aimait guère. Elle apprécie la compagnie d'un ami, le marquis des Arcis, mais ne cède à aucune des avances de ce libertin notoire. Jusqu'au jour où, après des mois d'une cour assidue, ledit marquis obtient ce qu'il veut... et se lasse finalement de la nouvelle relation qui s'est installée (je vous passe les détails, hein ?). Son chagrin dépassé, Madame de la Pommeraye pourra-t-elle être la vengeresse implacable de toutes les femmes opprimées ? Il me semble en réalité que ce n'est pas tout à fait le sujet du film. D'accord, le scénario tourne d'abord autour du prix que le marquis des Arcis devra payer pour son énième infidélité et au terme d'un redoutable complot ! Pourtant, Mademoiselle de Joncquières - du nom de celle qui sera peut-être l'instrument de la justice féminine - pourrait surprendre celles et ceux qui avaient cru au récit d'un règlement de comptes. Cela se tient, bien sûr, mais le film, très subtil, a d'autres facettes...
D'un point de vue visuel, le contrat est respecté: dans des décors intérieurs et extérieurs très soignés, il semble que les personnages évoluent naturellement, un peu comme s'ils étaient dans leurs habits de tous les jours. Les costumes sont d'ailleurs d'une grande beauté ! Cela dit, c'est d'abord à l'oreille que Mademoiselle de Joncquières séduit, grâce à des dialogues ciselés dans une langue très soutenue. Rassurez-vous: cela reste très compréhensible. Sans avoir encore pris le temps de chercher la réponse, je me suis demandé si ce français parlé était celui de l'époque, celui d'Emmanuel Mouret, une version hybride ou une réinterprétation des mots de Diderot - le tout premier à avoir raconté cette histoire, dans Jacques le fataliste, dès 1765. Quoi qu'il en soit, je veux saluer ici la belle performance des actrices et acteurs, habiles avec ces jolis mots et ces structures complexes. Cécile de France m'a bluffé, une fois encore ! Plus jeune, Alice Isaaz reste un peu en retrait: son rôle l'exige, mais elle ne démérite pas. Quant à Édouard Baer, il est comme chez lui. Bref, je me suis régalé !
Mademoiselle de Joncquières
Film français d'Emmanuel Mouret (2018)
Un petit bonheur, raffiné et piquant ! Le brave Choderlos de Laclos inspire plusieurs critiques, qui comparent cet élégant long-métrage aux adaptations cinéma de ses oeuvres incendiaires: Les liaisons dangereuses (Stephen Frears /1988) et Valmont (Milos Forman /89). Moi, je me suis souvenu de Portrait de femme (Jane Campion /96) ou du nanar Sexe intentions (Roger Kumble /99). Très dispensable...
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Une petite anecdote...
Grâce à l'amie Dasola, j'ai également appris que le texte de Diderot avait fait l'objet d'une première adaptation au cinéma, un film sorti en 1945 et de Robert Bresson: Les dames du bois de Boulogne. Désavoué par son auteur, il est transposé à la période contemporaine.
Et des liens pour la route...
Vous retrouverez donc le film du jour chez Dasola... et chez Pascale. Pour d'autres avis masculins, la lecture Strum et Benjamin s'impose.
Un Mouret très inhabituel (en costumes) que je serais curieuse de voir... Ses autres films ne m'ont pas forcément emballée mais il a vraiment un style à lui, et c'est déjà pas mal !
RépondreSupprimerSans doute le meilleur film d'Emmanuel Mouret (selon moi), dont j'ai bien aimé les autres films mais je suis RAVIE qu'il ait cédé la place à Edouard Baer.
RépondreSupprimerCe film est un délice pour les oreilles et les yeux.
Je me suis posée exactement la même question. Les gens parlaient-ils réellement ainsi au XVIIIème siècle ? Quel régal !
Alice Isaaz est très en retrait question paroles même si elle est au cœur de la vengeance et de l'attirance... mais dès qu'elle la prend : quelle présence !
@Chonchon:
RépondreSupprimerMoi, désormais, j'aimerais bien voir (au moins) un Mouret sans costumes.
Je pense que celui-là aurait toutes les chances de te plaire. Reste à attendre son passage télé.
@Pascale:
RépondreSupprimerSi jamais tu repasses par là et que tu as un autre Mouret à me conseiller...
Edouard Baer est vraiment bien, dans ce film, mais les filles s'en sortent à merveille également.
Je découvre que j'étais très enthousiaste pour Changement d'adresse...
RépondreSupprimerhttp://www.surlarouteducinema.com/archive/2006/06/26/changement-d’adresse-d’emmanuel-mouret.html
Je m'étais beaucoup emballée pour Frédérique Bel à l'époque... Grosse déception en la rencontrant dans la vraie vie. Une peste prétentieuse qui toise le citoyen ordinaire... Est-ce la raison pour laquelle sa carrière fait un joli flop (il me semble).
C'était la minute blonde... oups, la minute LDP.
Je m'étais beaucoup moins emballée pour L'Art d'aimer et encore moins pour Un baiser s'il vous plaît...
Bonjour Martin, merci pour le lien sur un film qui vaut le détour rien que pour Cécile de France. Bon dimanche.
RépondreSupprimer@Pascale:
RépondreSupprimer"Changement d'adresse" ? Je note. Merci.
À vrai dire, j'en ai laissé passer quelques-uns...
@Dasola:
RépondreSupprimerBonjour ! Personnellement, j'ai découvert Cécile de France avec "L'auberge espagnole" (2002).
Elle fait une belle carrière depuis... et j'aime la voir évoluer vers des rôles plus adultes.
Coucou Martin,
RépondreSupprimerLe film me tente beaucoup, mais j'attendrai sa sortie DVD, n'ayant plus l'occasion de me rendre dans les salles obscures ces derniers temps. Tu retrouveras mon billet sur Les Dames du bois de Boulogne de Robert Bresson dans ma deuxième moisson de vieux films, datant du 19 juillet ;-)
Excellent dimanche (ou ce qu'il en reste) !
Coucou Sentinelle ! Je pense que le film devrait te plaire. À suivre...
RépondreSupprimerQuant à moi, je tâcherai de voir "Les dames du bois de Boulogne" avant de retourner lire ton billet.
Merci pour le lien Martin. Une belle réussite d'Emmanuel Mouret, que j'aime bien (Changement d'adresse mais aussi L'art d'aimer).
RépondreSupprimerPas de quoi, Strum ! Et merci à toi pour ces nouvelles références !
RépondreSupprimerJe constate que "Changement d'adresse" semble faire une relative unanimité.
À suivre...