Une comédienne de théâtre s'est interrompue au milieu d'une tirade. Elle n'a plus jamais reparlé. Son médecin n'a rien décelé d'anormal dans ses analyses: Elisabet Vogler serait en parfaite santé, physique et mentale. Toujours surveillée, elle part dans une grande maison isolée, sur les rivages de l'île suédoise de Farö. Une convalescence qu'elle passe avec Alma, une jeune infirmière. Le début de Persona...
Cette fois, ça y est: j'ai vu un film d'Ingmar Bergman ! Je suis ravi d'en avoir eu la possibilité dans une salle de cinéma, en compagnie d'autres membres de "ma" petite association de cinéphiles. Persona échappe franchement aux diverses cases dans lesquelles on classe parfois les oeuvres artistiques. Il se lance en fait comme un projet expérimental, à coup d'images symboliques et quasi-subliminales. Éloge de la folie ? Le réalisateur vient de passer six mois à l'hôpital, entre la vie, le délire et la mort, quand il livre au regard cet opus d'une déroutante beauté. Cette très douloureuse expérience médicale lui aurait inspiré ces images, tout à fait novatrices pour l'époque. "Mes films sont l'explication de mes images", a dit un jour l'auteur suédois. Sur ce film: "Je sens qu'aujourd'hui, je suis arrivé aussi loin que je peux aller et que j'ai touché là, en toute liberté, à des secrets que seul le cinéma peut découvrir". Je dirais qu'il existe probablement autant d'interprétations de ce travail que de spectateurs. Sans lâcher les actrices, la caméra nous interroge et heurte nos rares certitudes.
En moins d'une heure et demie, pour peu qu'on y embarque, on peut alors prendre plaisir... à ne pas tout comprendre. Ce qui est explicite dans Persona est tout aussi évanescent, presque fantasmagorique. Séparer la réalité de la fiction s'avère vite impossible: l'impression d'étrangeté laissée par le film repose justement sur cette indécision. Qu'est-ce qui est vrai ? Qu'est-ce qui ressort d'une projection mentale d'une des deux protagonistes ? Je n'ai pas su trancher définitivement. Qu'importe, finalement: cela ne m'a aucunement empêché d'apprécier ce que j'ai vu - dans une copie parfaitement restaurée, ô joie ! Fixe ou soudain embarquée dans un travelling, la photographie étincelle ici d'une pureté remarquable, fruit d'un incroyable travail sur la lumière. L'île de Farö et ses très longues journées d'été offrent un cadre naturel des plus évocateurs: j'ai aimé arpenter cette terre inconnue. Bien qu'on ait attiré mon attention sur le son, je suis moi-même resté muet après la projection, le temps de laisser mûrir mes émotions. J'espère vous en convaincre: c'était une belle expérience de cinéma.
Persona
Film suédois d'Ingmar Bergman (1966)
Une vingtaine d'autres films du réalisateur scandinave attendent d'accrocher ma curiosité. Je voulais voir celui-là après avoir apprécié Sils Maria, certains critiques ayant fait état d'une parenté possible entre les deux oeuvres, chacune étant portée par un duo féminin. Noir et blanc oblige, j'ai songé à Psychose. Ma pensée dérive depuis vers Vol au-dessus d'un nid de coucou ou Soudain l'été dernier...
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Une autre clé, sans doute...
Ingmar Bergman voulait d'abord appeler son film... Cinématographie. Le titre finalement choisi désigne le masque porté par les tragédiens grecs, qui leur servait de porte-voix. C'est aussi l’appellation donnée par Carl Jung au visage que l'on offre à autrui dans la relation sociale.
Exigeant, peu amène, le film est discret sur les blogs...
Je l'ai tout de même retrouvé sur "Ma bulle", celui de Princécranoir.
Cette fois, ça y est: j'ai vu un film d'Ingmar Bergman ! Je suis ravi d'en avoir eu la possibilité dans une salle de cinéma, en compagnie d'autres membres de "ma" petite association de cinéphiles. Persona échappe franchement aux diverses cases dans lesquelles on classe parfois les oeuvres artistiques. Il se lance en fait comme un projet expérimental, à coup d'images symboliques et quasi-subliminales. Éloge de la folie ? Le réalisateur vient de passer six mois à l'hôpital, entre la vie, le délire et la mort, quand il livre au regard cet opus d'une déroutante beauté. Cette très douloureuse expérience médicale lui aurait inspiré ces images, tout à fait novatrices pour l'époque. "Mes films sont l'explication de mes images", a dit un jour l'auteur suédois. Sur ce film: "Je sens qu'aujourd'hui, je suis arrivé aussi loin que je peux aller et que j'ai touché là, en toute liberté, à des secrets que seul le cinéma peut découvrir". Je dirais qu'il existe probablement autant d'interprétations de ce travail que de spectateurs. Sans lâcher les actrices, la caméra nous interroge et heurte nos rares certitudes.
En moins d'une heure et demie, pour peu qu'on y embarque, on peut alors prendre plaisir... à ne pas tout comprendre. Ce qui est explicite dans Persona est tout aussi évanescent, presque fantasmagorique. Séparer la réalité de la fiction s'avère vite impossible: l'impression d'étrangeté laissée par le film repose justement sur cette indécision. Qu'est-ce qui est vrai ? Qu'est-ce qui ressort d'une projection mentale d'une des deux protagonistes ? Je n'ai pas su trancher définitivement. Qu'importe, finalement: cela ne m'a aucunement empêché d'apprécier ce que j'ai vu - dans une copie parfaitement restaurée, ô joie ! Fixe ou soudain embarquée dans un travelling, la photographie étincelle ici d'une pureté remarquable, fruit d'un incroyable travail sur la lumière. L'île de Farö et ses très longues journées d'été offrent un cadre naturel des plus évocateurs: j'ai aimé arpenter cette terre inconnue. Bien qu'on ait attiré mon attention sur le son, je suis moi-même resté muet après la projection, le temps de laisser mûrir mes émotions. J'espère vous en convaincre: c'était une belle expérience de cinéma.
Persona
Film suédois d'Ingmar Bergman (1966)
Une vingtaine d'autres films du réalisateur scandinave attendent d'accrocher ma curiosité. Je voulais voir celui-là après avoir apprécié Sils Maria, certains critiques ayant fait état d'une parenté possible entre les deux oeuvres, chacune étant portée par un duo féminin. Noir et blanc oblige, j'ai songé à Psychose. Ma pensée dérive depuis vers Vol au-dessus d'un nid de coucou ou Soudain l'été dernier...
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Une autre clé, sans doute...
Ingmar Bergman voulait d'abord appeler son film... Cinématographie. Le titre finalement choisi désigne le masque porté par les tragédiens grecs, qui leur servait de porte-voix. C'est aussi l’appellation donnée par Carl Jung au visage que l'on offre à autrui dans la relation sociale.
Exigeant, peu amène, le film est discret sur les blogs...
Je l'ai tout de même retrouvé sur "Ma bulle", celui de Princécranoir.
Et bien voilà, tu as enfin vu ton premier film de Bergman, dans de très bonnes conditions qui plus est. Et visiblement ce ne sera pas le dernier ;-)
RépondreSupprimerJe ne l'ai pas encore vu mais il est dans ma liste d'attente.
Nous serons donc amenés à en reparler, je suppose.
RépondreSupprimerVoilà un film marquant ! Je suis vraiment content d'avoir eu l'opportunité de découvrir mon premier Bergman sur grand écran, à l'occasion de la sortie de cette copie restaurée.
J'ai vu peu de Bergman, cte honte,
RépondreSupprimeret pas celui-ci...
Tu me donnes envie.
C'est vrai que parfois c'est agaçant de ne pas comprendre et d'autres fois c'est agréable.
Je suis content que ma chronique te donne envie de voir le film, Pascale. Je serais curieux de connaître ton avis.
RépondreSupprimerJe n'ai pas été frustré de ne pas tout comprendre, pour le coup. Au contraire, j'ai trouvé ça stimulant. C'est à mon avis un film qui peut avoir mille interprétations, en fonction de chacun de nos ressentis personnels.
Mmm, Persona... "j'aime l'infirmière maman" aurais-je pu fredonner après l'avoir vu. Film exigeant certes, mais profondément beau. Bientôt "le septième sceau" ?
RépondreSupprimer"Le septième sceau" fait partie de ma collection DVD, Princécranoir, mais je ne suis pas sûr d'avoir envie de le regarder tout de suite. Son tour viendra, c'est sûr.
RépondreSupprimerJ'ai en tout cas le sentiment d'être parti sur de bonnes bases avec Ingmar Bergman.