jeudi 31 mai 2012

Qui se ressemble...

Une chronique de Martin

J'avais vaguement repéré l'affiche. C'est en fait sur une proposition de Philippe et pour ainsi dire à l'aveuglette que je suis allé voir Tyrannosaur. Les yeux grand ouverts, j'ai apprécié ce film âpre venu d’Écosse. Un dénommé Joseph y traîne sa misère lestée d'alcool. Caché dans la boutique d'Hannah après une énième beuverie suivie d'une agression, l'homme ne fait même pas peine à voir. Aussitôt agressif avec ceux qui lui veulent du bien, il n'inspire vraiment aucune sympathie. Au tout premier regard, en tout cas...

Tyrannosaur, c'est une rencontre. Un homme et une femme: Lelouch n'a pas inventé ce duo classique du cinéma. À 38 ans, parfois acteur dans les films d'autres cinéastes, Considine passe ici à la réalisation. Bilan ? Une réussite. L'école britannique du film social compte désormais un nouveau lauréat. Le portrait croisé qui nous est offert brille d'une noirceur peu commune. Rude, le fond assène des coups violents. Épurée, la forme s'impose par son évidence. Une fois faites quelques recherches complémentaires sur le long-métrage, j'ai appris que le réalisateur souffrait du syndrome d'Asperger, une forme d'autisme. Le résultat de son travail n'en est que plus bluffant. J'aimerais ne pas tomber dans le cliché facile, mais on sent bien combien il a mis de lui dans sa création. Jamais racoleur, investi. L'unique petit bémol: quelques scènes un peu trop explicites. Question de dosage, à laquelle l'expérience saura, j'espère, répondre.

En attendant un éventuel deuxième film, je voudrais aussi souligner l'excellent choix de Considine en matière de distribution. Le truc également intéressant, c'est que je ne connaissais pas ces acteurs auparavant ! Peter Mullan m'a tout de suite capté: j'ai oublié l'homme et me suis immédiatement "plongé" dans son personnage, un signe qui ne trompe pas. Olivia Colman n'est pas en reste. Elle dévoile toute l'étendue de son talent à mesure que son rôle évolue: elle joue sur une multitude d'émotions, toujours juste au bon moment. Tyrannosaur tire sa force du réalisme que ses deux comédiens imposent. Eddie Marsan, brillant interprète de l'inquiétant mari d'Hannah, est lui aussi dans le ton. Le casting conserve également une place importante pour quelques autres visages méconnus et il y a même, si j'ai bien compris, un amateur anonyme repéré dans un pub de Glasgow. Option judicieuse au profit d'une œuvre sans concession.

Tyrannosaur
Film britannique de Paddy Considine (2011)
Trop absorbé par Clint Eastwood, je n'étais pas parvenu à apprécier Gran Torino à sa juste valeur. Sans l'avoir encore revu, le film évoqué aujourd'hui m'y a fait penser. Je me rends compte au final que je n'ai pas beaucoup parlé du scénario. Qu'importe: je précise tout de même qu'il laisse passer un peu de lumière - c'est rassurant. Autre comparaison possible: le très beau Fish tank d'Andrea Arnold. L'explication du titre ? Là, motus: c'est le film qui vous la donnera.

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Un dernier regard ailleurs ?
Vous pouvez lire l'analyse du film que publie "Sur la route du cinéma".

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