lundi 21 avril 2025

Idéal de Provence

Jean Giono a 35 ans en 1930 quand paraît Regain, l'un de ses romans cités parmi les plus réussis. C'est un autre célèbre auteur provençal qui en signe l'adaptation sept ans plus tard: Marcel Pagnol, bien sûr ! Les deux hommes sont nés la même année et ont collaboré à l'écriture du scénario. Je n'ai pas d'informations sur le déroulé des opérations...

Une certitude: le personnage qu'interprète Fernandel tient une place majeure dans le film, tandis qu'il serait vraiment "au second plan" dans le livre, d'après ce que j'ai pu lire ici et là. Gédémus, rémouleur faussement sympathique, trimbale sa carriole de village en village avec d'autant plus de difficultés qu'il a perdu son chien pour la tirer. Chance pour lui: il trouve une femme pour remplacer l'animal ! Ensemble, Arsule et lui parcourent les très escarpées campagnes provençales pour trouver de nouveaux clients. Et, un soir, le duo sauve un drôle d'homme d'une noyade dans une rivière sauvage. Finalement, un nouveau couple pourra se former, a priori plus franc...

Regain est un drôle de film, à la fois réaliste, poétique et onirique. D'après mon ressenti, il est ancré dans son époque, ces années trente encore porteuses d'un espoir républicain fondé à la fois sur le progrès et un essor économique enfin envisageable pour les classes sociales dites populaires. Une part de la belle imagerie autour de ces valeurs sera ensuite récupérée par les régimes autoritaires: triste constat ! Bientôt neuf décennies plus tard, le beau long-métrage que j'évoque aujourd'hui semble d'un autre temps - ce qui est de fait assez logique. Pourtant, avec le regard que la caméra amène sur la Provence d'alors et ses petits hameaux en voie de disparition, il y a dans cette histoire éternelle quelque chose de très touchant. Un humanisme profond qu'incarnent à merveille les deux acteurs de la photo, Orane Demazis dans le rôle d'Arsule (ou Irène, en fait) et Gabriel Gabrio en Panturle. Quelques autres protagonistes complètent le tableau, à voir ou revoir.

Regain
Film français de Marcel Pagnol (1937)

Pour son époque, je trouve finalement cet opus assez moderne. Évidemment, tout dépend aussi de l'oeil avec lequel on le regardera et/ou des attentes que son point de départ pourrait faire naître. Certains aspects peuvent étonnamment rappeler La strada (1954) ! Cela étant dit, liés à Pagnol, je préfère d'autres films: la trilogie marseillaise Marius-Fanny-César ou La fille du puisatier. À suivre...

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Et pour aller plus loin...

Je vous conseille de découvrir aussi l'intéressante analyse de Strum.

6 commentaires:

  1. Vu et lu (il y a longtemps) mais tu me donnes envie de revoir.
    Tu l'as trouvé en dvd ?
    Je me souviens d'un calvaire pour Arsule, de Fernadel à contre emploi et bizarrement j'ai oublié le 3ème personnage que tu mets en valeur et de la Provence ♥
    J'ai une passion pour Orane Demazis. Et pour les 4 films que tu cites.

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    1. J'espère donc que tu pourras le revoir. Je l'ai découvert sur une de mes chaînes payantes.
      Cela dit, il a peut-être été réédité en DVD, car plusieurs Pagnol sont ressortis au cinéma l'année dernière.

      Orane Demazis a gagné tout mon respect quand j'ai revu "Fanny" avec mes yeux adultes.
      J'ai apprécié son jeu et j'ai trouvé très intéressant ce que j'ai appris de son parcours avec Pagnol.

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  2. Merci pour ce billet!
    Il y a quelque temps, à l'occasion d'un "événement bloguesque Giono", je m'étais mis en tête de rédiger quatre billets sur les films de Pagnol tirés de l'oeuvre de Giono (outre Regain: La femme du boulanger, Jofroi, Angèle). A cette occasion, je m'étais aperçu qu'on n'en trouvait pas les DVD, ou alors "hors de prix" (parce qu'édités sous le contrôle de la famille Pagnol, si j'avais bien compris)... et avais donc renoncé à cette idée!
    (s) ta d loi du cine, "squatter" chez dasola

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    1. Oh, je vous en prie ! Merci à vous pour votre intérêt et cette anecdote !
      J'avoue que j'ai très envie de voir les autres films dont vous parlez également. Un jour, peut-être...

      Ensuite, j'aurais sûrement envie de revenir sur le duo Giono-Pagnol en tant qu'auteurs emblématiques du Midi.

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  3. Vu en version restaurée à Aubagne. Le petit fils de Pagnol présentait le film ,on a appris que ce type de version coûtait cher. Le village dans le film a été construit en décor dur dans les collines d’Aubagne, il a fallu tracer des routes avec les moyens de l’époque. De beaux rôles pour Fernandel et Orane Demazis. Dans le film,il est quand même dur avec cette pauvre Orane.

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    1. Oui, c'est pourquoi j'ai dit de son personnage qu'il était "faussement sympathique".
      Avec le souci toutefois de ne pas trop en révéler.

      Sauf oubli, c'est la première fois que je voyais Fernandel dans un rôle négatif.
      Je me dis qu'il ne doit pas en avoir joué beaucoup d'autres dans sa carrière, d'ailleurs.

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