lundi 10 mai 2021

Le prix à payer

L'édition 2021 du Festival de Cannes aurait dû démarrer... demain ! Qu'elle ait finalement lieu à partir du 6 juillet ne m'empêchera pas d'évoquer dès à présent l'un des lauréats de la compétition: Le salaire de la peur. 29 avril 1953: les jurés réunis autour de Jean Cocteau décernent un Grand Prix. Rappel: la Palme d'or n'existait pas encore...

Bien qu'entièrement tourné dans le sud de la France, le long-métrage est censé se dérouler au Guatemala. On y découvre, oisifs et perdus dans un village, accablés de chaleur, tout un ensemble d'aventuriers européens sans le sou - et dès lors incapables de rentrer chez eux. Constat d'évidence: cette troupe se croit supérieure à la population locale, mais, comme elle, (sur)vit d'expédients. Un incendie soudain dans une exploitation pétrolière voisine offre alors une solution possible à quatre types soucieux de s'offrir un ticket pour ailleurs. Mais le risque existe: pour toucher 2.000 dollars et tenter d'échapper enfin à leur misérable routine, il leur faut d'abord effectuer un job dangereux - le convoyage d'une grosse quantité de nitroglycérine ! Maintenant, je vous épargne le descriptif de la suite: le titre du film suffit sans doute à se faire une idée. C'est surtout en première partie que j'ai trouvé Le salaire de la peur intéressant. Le reste ? Mouais...

Je n'aime pas spécialement "dézinguer" les classiques, mais je veux être honnête: celui-là n'est pas tout à fait parvenu à m'embarquer. J'imagine toutefois que, sur grand écran, il a une toute autre allure. Même sur ma télé, certaines images sont franchement saisissantes. Je reviens sur ce début, placé au coeur d'une petite communauté d'Amérique centrale: on s'y croirait ! Et, par ailleurs, la complexité des plans et l'intelligence du montage font que, dans le même temps d'observation, on sent aussi une forme de décalage avec la réalité. Aucun doute: sur ce point, Le salaire de la peur est un (grand) film de cinéma. Malheureusement, après la très belle première heure d'exposition, je n'ai pas ressenti la tension attendue pour la suite. J'aurais voulu voir davantage d'images comme celle du photogramme ci-dessus: une illustration de l'incompréhension entre hommes blancs dits civilisés et populations autochtones privés de leur cadre naturel. Bref... c'est subjectif, bien sûr, mais ce film a pour moi un petit goût d'inachevé. Ai-je fait fausse route ? J'avais espéré l'aimer davantage !

Le salaire de la peur
Film français d'Henri-Georges Clouzot (1953)

Et les acteurs, là-dedans ? Yves Montand, Charles Vanel, Véra Clouzot et consorts ne sont nullement responsables de ma relative déception. C'est même pour eux que ma note spontanée a gagné une demi-étoile supplémentaire. Bon... je reste assez loin toutefois du plaisir pris devant Le corbeau et (surtout) Les diaboliques, du même Clouzot. Mais soyez rassurés: je ne compte pas renier ce cinéaste pour si peu !

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La parole est désormais à la défense...

Je vous donne à lire une critique positive: celle de "L'oeil sur l'écran". Tout autre avis favorable au film reste le bienvenu en commentaires !

6 commentaires:

  1. Clouzot disait : « La grande règle, c’est de porter les contrastes à leur maximum. » .
     Mission accomplie avec » Le salaire de la peur «  dont la peinture de la condition humaine ou s'opposent le courage, la lâcheté , la fraternité , la haine  ; sans oublier l’espoir et la désespérance ; est une vraie réussite qui va bien au delà de l'aventure épique proposée.
    Quant à la peinture sans concession des pays « du tiers-monde » sous domination  Américaine, poussant ses laissés pour compte à des actions suicidaires,elle me parait une démarche plutôt novatrice pour un film français des années 50.
    Si l'on rajoute que sans ce film Montant n'aurait peut être pas fait la carrière au cinéma que nous lui connaissons , et que visuellement le film est souvent impressionnant, ( Richard Brooks ne disait-il pas que le malheur ne peut se filmer qu'en noir et blanc), il convient de rajouter au moins une demie étoile à votre notation.

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  2. les laissés pour compte

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  3. Un bon film de camions. Je plaisante. C'est un bon Clouzot, mais inférieur, à mon sens, à plusieurs autres films de ce cinéaste. En effet, le personnage joué par Vanel ne me paraît pas très crédible quand la peur le tétanise au point d'abolir toute sa personnalité, déployée dans la première partie. Ceci dit, pour dépasser cette remarque critique, il faut peut-être admettre le principe de Clouzot, utilement indiqué par cc rider, sur les contrastes portés à leur maximum.
    (Quant à ma boutade sur les "films de camions", elle renvoie au fait que le succès du film a, semble-t-il, donné à certains l'idée d'exploiter au cinéma la fascination que les poids lourds, alors assez nouveaux, pouvait exercer sur une partie du public, comme l'attestent "Des gens sans importance", deux ans après seulement, "Cent mille dollars au soleil" de Verneuil, "Duel" de Spielberg, "Le convoi" de Peckinpah. Le remake de Friedkin s'inscrit lui aussi dans cette tendance)

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  4. @CC rider:

    Une demi-étoile pour la peinture ? En considérabt la photo du film, vous m'avez presque convaincu. Je pense que c'est un film qui supportera parfaitement une "revoyure". Je tâcherai de la concentrer sur la forme plutôt que sur la fin.

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  5. @CC rider 2:

    Yes, le lecteur aura évidemment rectifié de lui-même.

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  6. @Valfabert:

    Intéressante, votre analyse sur les camions. J'ai vu "Duel" et ça me donne envie de voir les autres films dont vous parlez.

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