dimanche 14 octobre 2018

La ville la nuit

Je vous ai parlé de ce temps pas si lointain où les lauréats des César défilaient pour remercier Claude Berri. J'ai appris - un peu plus tard - que Coluche en avait fait une blague ! Récompensé pour sa prestation dans Tchao pantin, l'humoriste est de fait excellent dans ce film noir. Sa chienne de vie, dit-on, se retrouve dans celle de son personnage...

Lambert est simple pompiste dans le 18ème arrondissement de Paris. Une nuit, sous une pluie battante, il voit débarquer Youssef, un jeune du quartier, dont la mobylette (volée, bien sûr) est tombée en panne. Bien que très différents l'un de l'autre, les deux hommes unissent leurs solitudes et deviennent amis. En fait, c'est presque un rapport de filiation qui viendra lier l'honnête travailleur au loulou insouciant. Tchao pantin respire la misère affective et, compte tenu de la photo grisâtre de Bruno Nuytten, on se dit vite que tout cela finira mal. Vérification faite, une rupture de récit survient à la moitié du film. Bien... ne comptez pas sur moi pour révéler quoi que ce soit de plus ! L'anecdote veut que Claude Berri, confiant dans le talent dramatique de son poulain, insista pour que le film sorte à la toute fin d'année pour attirer l'attention des jurys des César. Bien joué: outre Coluche meilleur acteur, Richard Anconina fut, lui, honoré de deux statuettes dorées, à savoir celles du meilleur second rôle et du meilleur espoir...

Les techniciens eurent droit à leur part du gâteau: à Bruno Nuytten déjà cité, l'académie voulut ajouter Gérard Lamps et Jean Labussière pour le son. Tchao pantin a donc marqué son temps, si j'ose dire. Qu'en reste-t-il aujourd'hui ? Une oeuvre remarquable d'authenticité. Complété notamment par Agnès Soral et Philippe Léotard, le casting fait merveille et rend nos émotions encore plus fortes. Le scénario sublime les traits d'une France d'en bas que l'on voit peu au cinéma. On peut aussi apprécier ce long-métrage comme l'un des derniers d'Alexandre Trauner, juif hongrois émigré en France dont la carrière de décorateur cinéma avait débuté... au tout début des années 30 ! En un mot comme en cent, ce film est un morceau de patrimoine. Quelque 3,8 millions de Français étaient allés le découvrir en salles l'année de sa sortie - ce qui lui vaut la 9ème place du box-office 1983. Trente-cinq ans plus tard, Paris a changé, certes, mais la "formule" fonctionne toujours. Je vous souhaite donc de le vérifier à votre tour.

Tchao pantin
Film français de Claude Berri (1983)

Désolé: aucun film ne me vient en comparaison, même si j'ai pensé à... Blade runner du fait de cette vision très sombre des réalités citadines. Les deux longs-métrages n'ont en commun que l'intérêt réel que je leur porte et la décennie 1980. Tiré d'un roman, Tchao pantin me rappelle ceux du regretté Jean-Claude Izzo et notamment un polar très rude: Total Khéops (dont je n'ai pas vu l'adaptation). À suivre...

6 commentaires:

  1. Jamais revu. Mais aimé à l'époque évidemment.
    Coluche nous avait bien eu à l'époque en nous montrant qui se cachait derrière le clown.
    Merci Claude Berry.
    Il est de bon ton de remercier Nuytten et sa photo. j'ai de plus en plus de mal avec ces lumières sombres, verdâtres et ces images cracra. Qui s'adaptent parfaitement au ton du film j'en conviens. Mais je ne pense pas que la poisse et la misère s'arrêtent quand le jour se lève ou qu'il fait beau.
    J'avoue qu'aujourd'hui les drames très sombres dans des lumières très glauques magacent un peu. Pas trop hein. Juste un peu.

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  2. Claude Berri, c'est avec un I.

    Oui, Coluche est vraiment bien ici, mieux que dans d'autres films dispensables.
    Je comprends ton ressenti sur les lumières glauques. Quand ça devient systématique, c'est relou.

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  3. Vu au moment de sa sortie... Mieux aimé Coluche ici que dans beaucoup d'autres de ses films où il "coluchait".

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  4. Ouais... à contre-emploi, Coluche est très bon, ici.
    Pour le voir "colucher", je préfère ses sketches... et les Restos !

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