C'est un fait: j'ai mille choses à découvrir du côté du cinéma italien. Par bonheur, comme l'an passé, mon association a choisi de terminer sa saison 2017-2018 avec un classique de la comédie transalpine. Mais Il boom est-il véritablement destiné à nous faire rire ? Pas sûr. Inédit en France jusqu'en novembre 2016, il était "négligé" en Italie...
Au cours du débat qui a suivi la projection, un intervenant a suggéré qu'en 1963, nos voisins avaient eu du mal à accepter le ton grinçant du film. Il boom tourne surtout autour de Giovanni Alberti, un quadra oublieux de ses origines modestes et qui mène donc la grande vie grâce au succès de ses affaires. C'est en tout cas ce que l'on imagine au début, mais il s'avère que l'habile businessman est en réalité criblé de dettes. Il le cache à sa femme, Silvia, pour conserver son amour. Problème: Giovanni ne trouve aucun ami pour l'aider à s'en sortir. Douteux, ses projets immobiliers ne convainquent plus personne ! C'est pourquoi le pauvre bougre en vient à envisager une solution autre, dont je vais taire la teneur, tout en soulignant simplement qu'elle exige de lui un sacrifice important. Il est fort vraisemblable que, derrière le vernis de la caricature, le film nous parle également de la manière dont l'Italie s'est redressée de la guerre et du fascisme. Il le fait avec drôlerie, parfois, mais pas seulement: la bouffonnerie ne résiste pas toujours à la mélancolie. Le drame social n'est pas loin.
Avis aux amateurs: Alberto Sordi nous offre ici un grand numéro. L'ensemble a fort belle allure, certes, mais sa prestation de soliste suffirait à justifier la découverte de ce film rare. L'acteur-caméléon court partout, se bat et se débat: il brille toujours, dans le burlesque comme dans le pathétique. Du coup, on rit et on pleure avec lui ! Croyez-moi, ces sentiments changent à toute allure, le personnage évoluant parfois au cours d'une même scène (et tout au long du film). C'est finalement ce qui l'humanise, alors que son comportement pourrait d'abord paraître indécent - il en subira de pires, à vrai dire. Je peux dès lors croire que le mauvais accueil réservé au film l'année de sa sortie est à relier avec la mauvaise conscience d'une nation redevenue prospère, mais qui restait hantée par quelques fantômes de son passé. Le titre Il boom nous indique que tout est allé très vite dans l'Italie d'alors, quand, dans le même temps, le scénario souligne que la réussite n'a pas atteint tout le monde de la même façon. Autant en rire, à l'italienne, et au moins tant que cela sera possible...
Il boom
Film italien de Vittorio de Sica (1963)
D'abord, un rappel: l'année dernière, c'est autour de Larmes de joie que mon association avait baissé le rideau (un très bon souvenir). Des comédies italiennes des sixties, je ne connaissais que Le pigeon et Ces messieurs dames. Ma toute première incursion chez De Sica est une réussite qui en appelle d'autres - et néoréalistes, si possible. Pour Alberto Sordi, vous pouvez aussi revoir... L'argent de la vieille !
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Je ne suis certes pas le seul à avoir vu le film...
Résultat: j'en profite pour relayer la chronique de "L'oeil sur l'écran".
Au cours du débat qui a suivi la projection, un intervenant a suggéré qu'en 1963, nos voisins avaient eu du mal à accepter le ton grinçant du film. Il boom tourne surtout autour de Giovanni Alberti, un quadra oublieux de ses origines modestes et qui mène donc la grande vie grâce au succès de ses affaires. C'est en tout cas ce que l'on imagine au début, mais il s'avère que l'habile businessman est en réalité criblé de dettes. Il le cache à sa femme, Silvia, pour conserver son amour. Problème: Giovanni ne trouve aucun ami pour l'aider à s'en sortir. Douteux, ses projets immobiliers ne convainquent plus personne ! C'est pourquoi le pauvre bougre en vient à envisager une solution autre, dont je vais taire la teneur, tout en soulignant simplement qu'elle exige de lui un sacrifice important. Il est fort vraisemblable que, derrière le vernis de la caricature, le film nous parle également de la manière dont l'Italie s'est redressée de la guerre et du fascisme. Il le fait avec drôlerie, parfois, mais pas seulement: la bouffonnerie ne résiste pas toujours à la mélancolie. Le drame social n'est pas loin.
Avis aux amateurs: Alberto Sordi nous offre ici un grand numéro. L'ensemble a fort belle allure, certes, mais sa prestation de soliste suffirait à justifier la découverte de ce film rare. L'acteur-caméléon court partout, se bat et se débat: il brille toujours, dans le burlesque comme dans le pathétique. Du coup, on rit et on pleure avec lui ! Croyez-moi, ces sentiments changent à toute allure, le personnage évoluant parfois au cours d'une même scène (et tout au long du film). C'est finalement ce qui l'humanise, alors que son comportement pourrait d'abord paraître indécent - il en subira de pires, à vrai dire. Je peux dès lors croire que le mauvais accueil réservé au film l'année de sa sortie est à relier avec la mauvaise conscience d'une nation redevenue prospère, mais qui restait hantée par quelques fantômes de son passé. Le titre Il boom nous indique que tout est allé très vite dans l'Italie d'alors, quand, dans le même temps, le scénario souligne que la réussite n'a pas atteint tout le monde de la même façon. Autant en rire, à l'italienne, et au moins tant que cela sera possible...
Il boom
Film italien de Vittorio de Sica (1963)
D'abord, un rappel: l'année dernière, c'est autour de Larmes de joie que mon association avait baissé le rideau (un très bon souvenir). Des comédies italiennes des sixties, je ne connaissais que Le pigeon et Ces messieurs dames. Ma toute première incursion chez De Sica est une réussite qui en appelle d'autres - et néoréalistes, si possible. Pour Alberto Sordi, vous pouvez aussi revoir... L'argent de la vieille !
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Je ne suis certes pas le seul à avoir vu le film...
Résultat: j'en profite pour relayer la chronique de "L'oeil sur l'écran".
Hello Martin. Je n'ai jamais vu Il Boom mais tu sais mon amour pour ce cinéma italien. Et si tu vas du côté de De Sica metteur en scène de bien belles choses t'attendent. Comme je te l'ai dit et comme je le répète souvent, jamais dans l'Histoire un cinéma n'a été aussi en adéquation avec une époque et un pays que les quelques années du Néoréalisme. De Vittorio citons Le voleur de bicyclette, Sciuscia, Umberto D. Miracle à Milan, Stazione Termini, La Ciociara s'éloignent déjà du NR. Mais des oeuvres plus tardives sont aussi très intéressantes, Mariage à l'italienne et Le jardin des Finzi-Contini.
RépondreSupprimerP.S.Gertrude va bien et te remercie.
Oh oui, je sais tout ça... et j'ai d'ailleurs pensé à toi en voyant le film.
RépondreSupprimerJe m'étais dit qu'il y avait de grandes chances que tu réagisses à ma chronique... gagné !
Je dois te dire qu'auparavant, j'étais curieux du cinéma italien, mais désormais, je suis même intéressé ! Je tâche de saisir toute occasion de découvrir un nouveau classique néoréaliste. Le prochain que je verrai pourrait bien être "Le voleur de bicyclette", que j'ai enregistré lors de son récent passage sur Arte.
"Il boom" m'a paru plus grinçant, parce que plus désabusé peut-être. Alberto Sordi y est vraiment très bon ! J'espère que tu auras l'occasion de le voir pour te faire ta propre opinion... et nous donner, qui sait ? l'opportunité d'en débattre.
Classique mais inconnu en tout cas.
RépondreSupprimerJ'ai été fascinée par le cinéma italien des décennies suivantes je pense avec des films comme Nous nous sommes tant aimés (une pépite) où là encore le drame côtoyait souvent la comédie. Et Vittorio Gassman a toujours fait battre tres fort mon coeur de midinette...
Mais qu'est-il arrivé au cinéma italien ? Même si on sent parfois un petit sursaut.
Devinette : j'ai vu hier grâce a l'opération Cinetrafic Un DVD contre un article, un film français (récent) dont le pitch ressemble à celui de Il boom où un homme se montrait oublieux de ses origines...
il va me falloir une bonne dose d'indulgence pour en dire du bien...
Merci pour la recommandation de "Nous nous sommes tant aimés".
RépondreSupprimerJe ne le sais pas précisément, mais à mon avis, il est arrivé plusieurs choses au cinéma italien:
- la situation économique du pays qui ne permet pas forcément aux films de se faire,
- l'exception culturelle française qui fait que les films italiens ne sont pas forcément les plus visibles chez nous.
- la fin de la logique du studio, qui a dû faire du mal à Cinécitta, même si le cinéma italien n'est évidemment pas QUE Cinécitta.
Comme toi, j'aimerais un regain d'énergie... et ne pas devoir limiter le cinéma italien actuel à Nanni Moretti (que j'aime beaucoup, cela dit).
Ta devinette me dit quelque chose...
Nous nous dommes tant aimés (quel titre ❤) est bouleversant.
RépondreSupprimerMerci pour l'analyse.
Tu as trouvé ?
Pas d'quoi pour l'analyse. Tu m'as convaincu de voir le Scola !
RépondreSupprimerPour ce qui est de ton film-mystère, je sèche. C'est peut-être le thème qui m'est familier...
Ah super. Tu vas te REGALER.
RépondreSupprimerEt il y est question tout du long... du Voleur de bicyclette (autre pépite, ma preferisco C'eravammo tanti amati).
Ch'est pourtant simp' hein biloute.
Ouais, bon... ça y est, j'y suis !
RépondreSupprimerCela aurait pu (et dû) me revenir, mais on est bien loin du cinéma italien... ouf !
Ah, Alberto Sordi, un de mes acteurs préférés. Il est souvent prodigieux. Content que tu aies aimé, Martin. Les décennies 1950/1960, ce sont pour moi les grandes décennies du cinéma italien. Dans les années 1970, le ton se fait encore plus grinçant, plus désabusé surtout. Il Boom, comédie à l'italienne, n'est pas très caractéristique du cinéma de De Sica, dont Edualc a cité les grands films. Avec Sordi, je te conseille en priorité Une Vie difficile de Dino Risi, un chef-d'oeuvre aussi drôle que mélancolique que j'ai chroniqué il n'y a pas longtemps. Et si tu veux mourir de rire, il y aussi Un héros de notre temps de Monicelli, où Sordi est tout simplement génial. Personnellement, je préfère le trio Risi-Comencini-Monicelli à Scola dans le genre de la comédie à l'italienne, mais c'est vrai que Nous nous sommes tant aimés dont parle Pascale est un bien beau film.
RépondreSupprimerUn grand merci, Strum, de continuer à élargir mon horizon cinéphile !
RépondreSupprimerFace à toutes ces pépites, je refuse de choisir et je continue de les découvrir, petit à petit.
Ce que tu dis de "Un héros de notre temps" titille fort ma curiosité.
De fait, je serais ravi de voir une comédie italienne désopilante… et Alberto Sordi dans ce registre.