vendredi 10 novembre 2017

Une dame brune

Mathieu Amalric est un garçon étonnant. Je crois savoir qu'il préfère réaliser un film qu'y être un personnage, mais il a connu des dizaines de rôles divers... et ne s'est tenu "que" sept fois derrière la caméra. Dans Barbara, son dernier opus de cinéaste, il joue aussi, mais reste dignement en retrait, de son sujet comme de son actrice principale...

S'il vous faut une seule bonne raison pour voir ce film, je crois inutile d'aller chercher très loin: la composition de Jeanne Balibar suffira. Maintenant, je me dois de préciser une chose: si, bientôt vingt ans après sa disparition, Barbara m'est familière, il ne m'est pas possible d'affirmer que j'en sais beaucoup sur cette artiste hors de la norme. Paradoxalement peut-être, je n'avais pas spécialement envie de voir un biopic ordinaire qui m'aurait tout dit de sa vie et de son oeuvre. Résultat: quand j'ai su que Mathieu Amalric abordait le personnage par le côté, en inventant un film dans le film, avec une femme chargée d'interpréter son rôle, j'ai assez vite pensé que ce choix audacieux pourrait me convenir. Et, dans l'ensemble, ça s'est vérifié. Ce qui ne veut certes pas dire que ce sera le cas pour tout le monde !

Barbara - le film - nous propose un étrange jeu de faux semblants. Les images qui s'enchaînent imposent à l'évidence plusieurs niveaux de lecture: souvent, on passe ainsi du film de 2017 au long-métrage tourné en son sein. On a droit aussi à quelques images d'archives ! Assez virtuose, le résultat doit sans doute beaucoup à un montage impeccable, qui parvient à nous promener sans jamais nous égarer vraiment. Je le répète: la performance (mimétique) de Jeanne Balibar apporte toute sa vraisemblance à ce qui n'est presque qu'une fiction. L'air de rien, le film nous interroge aussi sur la part de fantasme inhérente au personnage et sur ce qui pouvait rester de Monique Serf une fois le rideau tombé. Il faut accepter de perdre quelques repères pour se plonger véritablement dans cette pseudo-biographie filmée. Vous pourriez y apprécier aussi un hommage rendu aux petites mains du cinéma et, naturellement, à un grand nom de la chanson française.

Barbara
Film français de Mathieu Amalric (2017)
Le cinéaste avait déjà démontré son goût pour les artistes de la scène avec Tournée, un autre de ses films que j'avais vraiment apprécié. Parfois un peu "auteurisante" sans doute, sa façon de faire du cinéma demeure assez atypique et, du même coup, intéressante, je trouve. Libre à vous, bien entendu, de préférer les biopics comme Cloclo. Quant à l'originalité du personnage, Shine est un bon cran au-dessus !

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Pour finir, ce constat: le film ne fait pas l'unanimité...

Bon... vous pourrez d'abord vérifier que Pascale l'a plutôt apprécié. Eeguab, lui, n'en a rien retenu d'agréable et l'exécute en deux lignes !

4 commentaires:

  1. Hello Martin. C'est vrai que je l'expédie en deux lignes. Il y a une troisième ligne où j'écris que ce n'est que mon avis, ce que je fais souvent quand j'ai la dent dure. Il me semble que, de peur de tomber dans le biopic un peu sans âme et routinier, Amalric a alambiqué son propos, l'a compliqué et surtout a fait apparaître un personnage de metteur en scène névrosé qui m'a très vite irrité. Ca friserait le snobisme, non. Barbara, chanteuse, et quelle chanteuse, quels textes. Elle mérite tellement d'être écoutée, encore et encore. Encore une fois...ce n'est que mon avis. A bientôt.

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  2. Ce n'était effectivement que ton avis et je l'avais reçu comme tel. No problemo.
    Rien à redire car, moi aussi, je dois bien l'avouer, il m'arrive d'être saisi d'une "envie de bâcler".

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  3. Amalric que j'ai tant aimé m'est devenu insupportable. Ce n'est pas physique, c'est auditif. Sa voix ou plutôt sa diction est exaspérante.
    Mais je suis contente de ne pas être passée à côté de l'interprétation exceptionnelle et respectueuse de Jeanne Balibar.
    Sans vouloir ramener ma science, il me semble évident que l'avis qu'on émet sur un blog est le sien propre :-)

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  4. Ne viens pas dire après que c'est moi qui joue sur les mots ! Même si c'est souvent vrai...
    Amalric a le bon goût ici de laisser l'essentiel de la lumière à Balibar, que je trouve stupéfiante.

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