De la frustration cinéphile naissent parfois de belles surprises. Aujourd'hui, je voulais évoquer un film d'Orson Welles, mais le fait est que mon enregistrement programmé n'a pas fonctionné ! Dépité d'abord, je me rabats vers Printemps tunisien, le film... tunisien alors choisi comme "programme de remplacement" de ma soirée télé.
Me revoilà déjà obligé de reparler d'Arte ! En effet, s'il a pu être projeté en salles dans son pays d'origine, Printemps tunisien repose d'abord sur une commande de la chaîne franco-allemande, où il a été diffusé un peu avant Noël, en 2014. Ses producteurs le présentent officiellement comme le premier film tunisien évoquant la Révolution de jasmin, qui a vu le départ du président Zine el-Abidine Ben Ali après presque un quart de siècle au pouvoir, au tout début de 2011. Précision importante: il ne s'agit pas d'un documentaire. J'ajoute d'ailleurs que mes connaissances sur la Tunisie sont bien trop limitées pour que je fasse la part de ce qui reproduit la réalité et de ce qui est inventé ou modifié pour les besoins de la cause cinématographique. Reste une certitude: ce récit pas-tout-à-fait-historique m'a marqué. Sans esbroufe, il évoque ce que peut être la vie sous un régime autoritaire, où le citoyen lambda marche sur un fil en permanence...
L'intelligence de ce film consiste à placer le propos à la hauteur d'hommes et femmes ordinaires. Les trois protagonistes principaux sont des amis musiciens, chargés un jour de l'animation d'un mariage dans la haute société, en présence de l'épouse du président. Prudence ou intelligence, je ne sais, mais seul son prénom - Leïla - est cité. Impossible de ne pas reconnaître Leïla Trabelsi, la véritable femme du dictateur désormais déchu: dans le film, son mutisme permanent renforce incontestablement son charisme glacial. Ce visage féminin est contrebalancé par un autre, celui de Noura, jeune femme éprise d'une plus grande liberté, bien qu'issue d'un milieu plutôt favorisé. Printemps tunisien m'a justement plu pour ce vrai sens de la nuance. Quand elle veut dénoncer quelque chose, la réalisatrice montre clairement une situation, mais évite toujours les grands discours. Même ses personnages positifs échappent au monolithisme simplificateur et se heurtent à certaines de leurs auto-contradictions. La fin est donc très juste, entre vraie tragédie et espoir pour l'avenir.
Printemps tunisien
Film tunisien de Raja Amari (2014)
Je trouve fort que ce long-métrage ait été réalisé par une femme ! J'ai pris une belle leçon de courage et de libre-arbitre, si puissante d'ailleurs qu'elle me fait m'intéresser aux autres films de Raja Amari. Au-delà, cela réveille aussi mon intérêt pour le cinéma nord-africain contemporain. Le Challat de Tunis du côté tunisien et Le repenti pour l'Algérie sont très recommandables pour une première approche.
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Bon, allez, tant que j'y suis...
Je fais de la pub à Dasola, qui a évoqué un autre film de la cinéaste.
Me revoilà déjà obligé de reparler d'Arte ! En effet, s'il a pu être projeté en salles dans son pays d'origine, Printemps tunisien repose d'abord sur une commande de la chaîne franco-allemande, où il a été diffusé un peu avant Noël, en 2014. Ses producteurs le présentent officiellement comme le premier film tunisien évoquant la Révolution de jasmin, qui a vu le départ du président Zine el-Abidine Ben Ali après presque un quart de siècle au pouvoir, au tout début de 2011. Précision importante: il ne s'agit pas d'un documentaire. J'ajoute d'ailleurs que mes connaissances sur la Tunisie sont bien trop limitées pour que je fasse la part de ce qui reproduit la réalité et de ce qui est inventé ou modifié pour les besoins de la cause cinématographique. Reste une certitude: ce récit pas-tout-à-fait-historique m'a marqué. Sans esbroufe, il évoque ce que peut être la vie sous un régime autoritaire, où le citoyen lambda marche sur un fil en permanence...
L'intelligence de ce film consiste à placer le propos à la hauteur d'hommes et femmes ordinaires. Les trois protagonistes principaux sont des amis musiciens, chargés un jour de l'animation d'un mariage dans la haute société, en présence de l'épouse du président. Prudence ou intelligence, je ne sais, mais seul son prénom - Leïla - est cité. Impossible de ne pas reconnaître Leïla Trabelsi, la véritable femme du dictateur désormais déchu: dans le film, son mutisme permanent renforce incontestablement son charisme glacial. Ce visage féminin est contrebalancé par un autre, celui de Noura, jeune femme éprise d'une plus grande liberté, bien qu'issue d'un milieu plutôt favorisé. Printemps tunisien m'a justement plu pour ce vrai sens de la nuance. Quand elle veut dénoncer quelque chose, la réalisatrice montre clairement une situation, mais évite toujours les grands discours. Même ses personnages positifs échappent au monolithisme simplificateur et se heurtent à certaines de leurs auto-contradictions. La fin est donc très juste, entre vraie tragédie et espoir pour l'avenir.
Printemps tunisien
Film tunisien de Raja Amari (2014)
Je trouve fort que ce long-métrage ait été réalisé par une femme ! J'ai pris une belle leçon de courage et de libre-arbitre, si puissante d'ailleurs qu'elle me fait m'intéresser aux autres films de Raja Amari. Au-delà, cela réveille aussi mon intérêt pour le cinéma nord-africain contemporain. Le Challat de Tunis du côté tunisien et Le repenti pour l'Algérie sont très recommandables pour une première approche.
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Bon, allez, tant que j'y suis...
Je fais de la pub à Dasola, qui a évoqué un autre film de la cinéaste.
merci pour ta chronique
RépondreSupprimerMerci de faire partie de mes lectrices fidèles, Chaga !
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