Un matin où je devais rester à jeun, j'ai eu l'inspiration et l'envie soudaine d'une chronique gourmande. Faute d'être parvenu à trouver quelque chose de très complet à raconter, j'ai alors pensé aux sens. Vous le savez: le cinéma mobilise à la fois notre vue et notre ouïe. Nos autres facultés sont mises de côté. Faut-il le déplorer ? Pas sûr...
Cela dit, devant #Chef, l'autre jour, j'aurais bien testé la cuisine cubaine concoctée par Jon Favreau. Je suppose que ça arrivera devant d'autres films: quand la caméra prend un malin plaisir à titiller nos papilles, l'absence de goût est relativement frustrante au cinéma. Avant que vous vous vengiez sur le popcorn, je tiens à vous rappeler que le goût, c'est aussi le dégoût. Je n'ai pas spécialement envie d'entrer dans une salle pour manger quelque chose que je trouve dégueulasse. Je préfère conserver de l'appétit pour après la séance...
C'est un peu la même chose avec l'odorat: on peut sans doute rêver d'un film qui nous emmène au royaume des senteurs et fragrances subtiles, mais les odeurs de nos vies ne sont pas toujours agréables. Pourquoi s'imposer celles du pourrissement, par exemple ? Je trouve beaucoup plus stimulant que le cinéma fasse appel à notre mémoire olfactive - largement affective, d'après moi. Je constate au passage que Le parfum, adapté du roman de Patrick Süskind, envoûtait moins à l'écran qu'à l'écrit. Et que l'odeur des vieux livres reste inimitable...
Pouvoir toucher un film, serait-ce une source de bonnes sensations ? Là encore, je crois que tout dépend du contexte. Ce sens particulier fait aussi appel à notre intimité: toucher, soit, mais être touché ? N'est-il pas préférable que le cinéma garde une distance raisonnable avec notre épiderme ? La leçon de piano illustre bien cette différence entre le toucher voulu et le toucher subi. Les plaisirs qu'on y prend dépendent au fond de chacun de nous - ils ne peuvent se décréter. Personnellement, j'estime que chacun doit rester libre sur ce point...
Une grande question demeure ouverte: existe-t-il un Sixième sens auquel le cinéma serait capable de nous familiariser ? Je ne crois pas. Qu'attendre de lui qu'il ne procure pas déjà ? Je ne sais pas. J'imagine qu'un fantasme cinéphile pourrait consister à être encore plus plongé dans l'histoire qu'un film raconte, mais j'aime que les personnages restent des êtres de fiction, aussi crédibles - et aimables - soient-ils.
Nous maintenir en contact avec le temps, en revanche, pourrait être un concept intéressant, mais les films en temps réel, ça existe déjà. J'ignore si la 3D saura finalement s'imposer comme vrai standard créatif, si une innovation ultime viendra la supplanter, si les artistes et techniciens inventeront d'autres façons de rêver, les yeux ouverts. Le septième art me va tel qu'il est, en fait. Demain ? On verra bien...
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Et surtout, que personne n'hésite à me contredire !
C'est typiquement le genre de sujets dont je serais ravi de débattre.
Cela dit, devant #Chef, l'autre jour, j'aurais bien testé la cuisine cubaine concoctée par Jon Favreau. Je suppose que ça arrivera devant d'autres films: quand la caméra prend un malin plaisir à titiller nos papilles, l'absence de goût est relativement frustrante au cinéma. Avant que vous vous vengiez sur le popcorn, je tiens à vous rappeler que le goût, c'est aussi le dégoût. Je n'ai pas spécialement envie d'entrer dans une salle pour manger quelque chose que je trouve dégueulasse. Je préfère conserver de l'appétit pour après la séance...
C'est un peu la même chose avec l'odorat: on peut sans doute rêver d'un film qui nous emmène au royaume des senteurs et fragrances subtiles, mais les odeurs de nos vies ne sont pas toujours agréables. Pourquoi s'imposer celles du pourrissement, par exemple ? Je trouve beaucoup plus stimulant que le cinéma fasse appel à notre mémoire olfactive - largement affective, d'après moi. Je constate au passage que Le parfum, adapté du roman de Patrick Süskind, envoûtait moins à l'écran qu'à l'écrit. Et que l'odeur des vieux livres reste inimitable...
Pouvoir toucher un film, serait-ce une source de bonnes sensations ? Là encore, je crois que tout dépend du contexte. Ce sens particulier fait aussi appel à notre intimité: toucher, soit, mais être touché ? N'est-il pas préférable que le cinéma garde une distance raisonnable avec notre épiderme ? La leçon de piano illustre bien cette différence entre le toucher voulu et le toucher subi. Les plaisirs qu'on y prend dépendent au fond de chacun de nous - ils ne peuvent se décréter. Personnellement, j'estime que chacun doit rester libre sur ce point...
Une grande question demeure ouverte: existe-t-il un Sixième sens auquel le cinéma serait capable de nous familiariser ? Je ne crois pas. Qu'attendre de lui qu'il ne procure pas déjà ? Je ne sais pas. J'imagine qu'un fantasme cinéphile pourrait consister à être encore plus plongé dans l'histoire qu'un film raconte, mais j'aime que les personnages restent des êtres de fiction, aussi crédibles - et aimables - soient-ils.
Nous maintenir en contact avec le temps, en revanche, pourrait être un concept intéressant, mais les films en temps réel, ça existe déjà. J'ignore si la 3D saura finalement s'imposer comme vrai standard créatif, si une innovation ultime viendra la supplanter, si les artistes et techniciens inventeront d'autres façons de rêver, les yeux ouverts. Le septième art me va tel qu'il est, en fait. Demain ? On verra bien...
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Et surtout, que personne n'hésite à me contredire !
C'est typiquement le genre de sujets dont je serais ravi de débattre.
Bonjour Martin,
RépondreSupprimeril y eut une petite mode de films en "odorama", où il fallait, quand un signal apparaissait à l'écran, gratter une petite pastille odorante. Je crois me rappeler que John Waters eut recours à ce procédé...pas toujours pour de bonnes odeurs, d'ailleurs.
C'est sans doute anecdotique, mais j'aimerais tester, juste une fois, pour voir...enfin, pour sentir !
C'est vrai que c'est un sacré défi de faire des films autour de sens auxquels le spectateur est pourtant privé (j'aimerais tellement bouffer certains plats dans les films) ! Je remarque d'ailleurs qu'il y a pas mal de films autour du goût qui ne sont toujours des réussites...
RépondreSupprimer@Laurent:
RépondreSupprimerJe me souviens de cette histoire de films en odorama en effet, même si je n'avais pas eu l'occasion de tenter l'expérience. Si ça devait se généraliser d'une manière ou d'une autre, je ne suis pas sûr d'ailleurs que ce serait si agréable d'avoir toujours les narines sollicitées au cours d'une projection.
@Tina:
RépondreSupprimerAh oui, il arrive que le cinéma donne faim ! Moi qui ne suis pas un habitué du pot de popcorn, je dois dire qu'il m'arrive tout de même de saliver devant certaines images de films liées à la nourriture ! Comme quoi, un bon repas après une séance, il n'y a rien de tel !
Tout à fait d'accord avec toi pour dire que les films sur le goût ne sont pas toujours excellents.