lundi 13 octobre 2014

Périple en fauteuil

Mission accomplie ! J'ai désormais vu l'ensemble des films du duo Benoît Delépine / Gustave Kervern. J'ai fini par le début et regardé Aaltra, leur tout premier opus, il y a maintenant quelques semaines. Le hasard est généreux: cela fait jour pour jour dix ans aujourd'hui que les Grolandais ont envahi les écrans des salles de cinéma français. Ce film-là était d'abord passé par la Belgique. Sans blague.

Aaltra m'a vraiment plu. Le fait qu'il ait été tourné en noir et blanc pourrait décevoir, mais c'est finalement tout le contraire: ce choix renforce encore son incongruité. Il est ici question de deux voisins ennemis: l'un, cadre dans son costard-cravate de rigueur, vient juste d'être viré, tandis que l'autre, agriculteur en Marcel blanc, flemmarde allégrement alors qu'il est censé moissonner. Une vague histoire d'inimitié campagnarde va causer une bagarre entre les deux larrons. Un accident plus tard, les voilà tous les deux paraplégiques et, pire, condamnés à s'entendre pour cheminer de concert vers la Finlande. Objectif affiché: récupérer une indemnisation auprès du constructeur qui a fabriqué la remorque qu'ils ont prise sur le coin du museau ! Farfelu, vous avez dit farfelu ? Je confirme. Et parce que Ben et Gus n'ont peur de rien, une partie des - rares - dialogues est en flamand ou en finnois, mais sans aucun sous-titre. Le cinéma est voyage...

Les habitués des deux fous évolueront toutefois en terrain familier. Pour ce premier essai, Delépine et Kervern restent les personnages principaux de leur drôle d'aventure. Ils ont également cru bon d'inviter quelques-uns de leurs fidèles amis pour amuser la galerie. Bingo ! Personnellement, j'aime ces caméos. Benoît Poelvoorde s'offre ainsi un énième rôle de crétin prétentieux, avec sa voix reconnaissable entre mille, mais le dos tourné à la caméra. Bouli Lanners, lui, chante Sunny de Boney M comme vous ne l'avez sans doute jamais entendu. Finlande oblige, vous pourrez aussi compter sur une apparition tardive et drolatique... d'Aki Kaurismäki ! Le cinéaste d'Orimattila fait partie des références affichées de ses hôtes français: son humour nordique colle bien avec celui d'Aaltra. Comme d'autres qui lui sont personnels, le périple que propose le long-métrage ouvre une fenêtre sur une Europe méconnue. Personne ne vous oblige à en rentrer tôt.

Aaltra
Film franco-belge de B. Delépine et G. Kervern (2004)

Deux mecs en fauteuil roulant sur les routes du nord pour obtenir quelque argent: ce genre de road movie improbable peut rappeler d'autres folies, comme Leningrad Cowboys go America, bien sûr. Kaurismäki, Delépine / Kervern, même combat ? Possible. Le film présenté aujourd'hui n'a pas véritablement la tonalité sociale de ceux qui suivront - Louise-Michel, Le grand soir. J'ai rigolé quand même.

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