Une chronique de Martin
C'est Wikipedia qui me l'apprend: plusieurs films ont choisi le titre The man who wasn't there. Je comprends beaucoup mieux que celui des frères Coen ait été distribué en France sous un nom compliqué rédigé en deux langues: The barber - L'homme qui n'était pas là.
J'avais vaguement repéré son passage à la télé le mois dernier. L'écran allumé quand il a commencé, je me suis gentiment laissé prendre au jeu, fasciné d'abord par la beauté de son noir et blanc. L'anecdote veut d'ailleurs qu'aux États-Unis, pour promouvoir le film sur support DVD, l'éditeur ait exigé qu'une version en couleurs soit également mise en avant. Remercions donc Arte d'avoir bien voulu diffuser le long-métrage tels que ses créateurs l'ont conçu. Il n'y a que les voix américaines qui auront (cruellement) manqué à l'appel...
The barber ? Le coiffeur ? Billy Bob Thornton lui prête ses traits. Moins évident peut-être sur un portrait rapproché, l'intrigue du film se déroule à l'aube des années 50. L'homme a une caractéristique bien peu enviable: parce qu'il ne parle presque pas, personne ne fait jamais attention à lui. Aussi, quand la police déboule dans son salon pour le prévenir que sa femme a été incarcérée, elle ne le voit même pas et s'adresse d'abord à son associé et beau-frère. Cruelle destinée qui fait qu'Ed Crane - c'est son nom - n'est même pas considéré comme un suspect du meurtre de l'amant de son épouse, alors même que, bien sûr, il l'a commis. Je passe sur le pourquoi du comment.
L'enquête policière n'est pas le sujet du film. Aucun des enjeux dramatiques de l'intrigue n'échappe véritablement à notre regard. Comme à leurs habitudes, les Coen brothers préfèrent se concentrer sur les personnages. Femme adultère et idiote d'un cynisme désarmant, Frances McDormand est une nouvelle fois parfaite. D'autres habitués des frangins émergent du casting, en particulier Richard Jenkins, et on notera avec plaisir la présence d'autres stars réputées, comme James Gandolfini ou la jeune Scarlett Johansson. Précision importante: porté par une voix off régulière et une photo impeccable, The barber n'est pas franchement une comédie. J'admets sans mal que le style est là et que certaines scènes improbables sont bel et bien caractéristiques d'une patte. Reste néanmoins que le fond est, si ce n'est tragique, du moins ouvertement pathétique. Certains ont pu parler du long-métrage comme d'une oeuvre mineure. Je ne suis pas d'accord: en multipliant les références aux films noirs, il s'inscrit aussi dans leur tradition. Quand le générique est arrivé, j'avais souvent souri et il me restait un goût amer. Je ne pensais pas en arriver là. Dès que le cinéma soigne autant la forme et le fond, je ne peux finalement que l'aimer.
The barber - L'homme qui n'était pas là
Film américain d'Ethan et Joel Coen (2001)
Pour mon plus grand plaisir et j'espère le vôtre, les frères deviennent des habitués du blog. Je dois encore me retourner vers leurs oeuvres de jeunesse, mais c'est avec enthousiasme que je m'y prépare doucement. Dans leur filmographie, je place Fargo au sommet. Objectivement, Intolérable cruauté est moins puissant, mais j'ai une sympathie particulière pour ce film aussi, sans parler de celle qu'inspire en moi Burn after reading, merveille de bouffonnerie. Restons-en là pour les comparaisons: les Coen sont inimitables !
----------
Je ne suis pas le seul à aimer ce film...
La preuve, les rédacteurs de "L'oeil sur l'écran" l'ont apprécié aussi. Quant au Festival de Cannes, il l'a salué d'un Prix de la mise en scène.
"Miller's crossing "est un chef d'œuvre.
RépondreSupprimerPensée émue pour James Gandolfini
inoubliable "Tony Soprano" mais immense acteur. Il le prouve dans ce film..!