Une chronique de Martin
Je m'étais posé la question: faut-il déjà bien connaître Joy Division pour apprécier le film qui leur est consacré, Control ? Si j'en crois mon ressenti personnel, la réponse est non. J'ignorais presque tout de ce groupe anglais mythique de la fin des années 70, mais j'ai aimé découvrir le long-métrage. À vrai dire, plus qu'une biographie filmée des quatre musiciens, il se tourne surtout vers le leader, Ian Curtis.
Ce que le jeune homme a de fascinant ? Sa carrière de météorite autour d'une vie de rock star, mariée à dix-neuf ans, suicidée à 23.
Tout en musique, évidemment, Control ressemble donc à un film social anglais de la veine d'un Ken Loach, plus qu'à une hagiographie univoque d'ancien groupie. Anton Corbijn, le réalisateur (hollandais) de ce drame, connaît pourtant la chanson: avant d'oser se lancer ici dans le tournage de son premier long-métrage, il a fait ses débuts comme photographe dans un mensuel musical. C'est ainsi qu'il a notamment connu Joy Division. Depuis les années 80, il a aussi signé un grand nombre de clips vidéo, fruits notamment d'une collaboration de longue durée avec Depeche Mode. Sa première semi-fiction porte évidemment la marque de cette riche expérience. On notera également au passage que, filmée en noir et blanc, elle crédite Debbie Curtis, la veuve de Ian, investie en qualité de co-productrice.
Debbie est aussi l'âme du film, l'une de ses victimes innocentes. Première muse, épouse fidèle, mère d'une petite Natalie, elle reste au foyer en attendant les retours de tournée de son rockeur de mari. Elle supporte ses silences et ses inspirations nocturnes, assume comme elle peut son angoisse devant son absence et ses crises d'épilepsie répétées, essaye chaque jour de se dire que tout va bien et qu'elle a bien la vie qu'elle avait imaginé vivre. On ne regrette pas que Control ait fait le choix d'aborder la vie d'une star par l'intime. Cette audace offre au contraire au film ses plus beaux contrastes. Entre la blancheur aveuglante des projecteurs et la noirceur retrouvée à l'intérieur de sa relation de couple, Ian Curtis se débat avant de se laisser emporter. Et, sans le connaître, on part avec lui...
Control
Film anglais d'Anton Corbijn (2007)
Bravo à tous les acteurs qui se sont investis dans cette œuvre âpre ! C'est seulement après avoir apprécié le long-métrage que j'ai voulu me pencher plus avant sur la carrière de Joy Division. Il s'avère finalement que ce que montre le film est conforme à la triste réalité. Difficile, dès lors, de trouver une oeuvre cinématographique comparable. Je citerais bien Amadeus pour un autre destin tragique lié à la musique, mais c'est aller chercher loin. Cloclo ? Piste crédible certes, mais dans un registre bien différent. Autant que j'attende d'avoir vu d'autres films musicaux pour y revenir. Et d'ici là, je peux revenir à l'essentiel en écoutant quelques morceaux rock des 70s.
----------
Une autre chronique à lire ?
Pascale, rédactrice de "Sur la route du cinéma", partage mon avis.
Très beau film. Il m'avait fait forte impression au ciné !
RépondreSupprimer