J'espère pouvoir un jour aller en Algérie. Notre voisin méditerranéen est déjà le pays africain le plus représenté sur Mille et une bobines. J'ajoute aujourd'hui un sixième film à la liste de mes chroniques algériennes: le récent Papicha, que j'ai vu sur une plateforme VOD mise en place à l'occasion du confinement. C'est toujours ça de pris...
Il paraît qu'à Alger spécifiquement, on appelle "papicha" une femme jeune, drôle et libérée. Ce n'est apparemment pas un terme péjoratif. Le film, lui, nous ramène au début des années 90. Un contexte historique important: à cette époque, alors que le gouvernement officiel vient d'annuler des élections donnant la victoire à des partis radicaux islamistes, le pays s'enfonce rapidement dans la violence. Les Algériens parlent d'une décennie noire: sans merci, la guerre civile qui commence causera la mort - ou la disparition ! - de dizaines de milliers de personnes. D'autres seront déplacées ou s'exileront. L'héroïne de Papicha, Nedjma, vit à la cité universitaire et travaille dur pour devenir styliste. Un drame soudain qui endeuille sa famille l'incite à se révolter: elle convainc ses copines d'organiser... un défilé de mode sur le campus ! Je vous laisse découvrir seuls ce qu'il advient de ce projet. Il est évident que sa mise en oeuvre n'a rien d'évident...
Autant le dire: même s'il donne à voir le fruit d'une belle solidarité entre filles, Papicha est bien un film dur, qui s'inspire de faits réels survenus en différents endroits et sans doute à plusieurs moments pour composer un récit unique. Souvent, ce récit prend aux tripes ! Deux des César 2020 l'ont récompensé: celui du meilleur premier film et celui (mérité) du meilleur espoir féminin, décerné à Lyna Khoudri. Cela dit, pour moi, c'est vraiment une réussite collective: l'actrice principale attire naturellement la lumière, mais ses partenaires de jeu font montre de talent aussi, dès lors que la caméra s'intéresse à elles. Il peut d'ailleurs arriver que tout s'emballe: la prise de vue "à l'épaule" vient amplifier le sentiment d'urgence et renforcer notre impression d'immersion dans le groupe - même si l'image est alors moins nette. Après la projection, j'ai vu que certains regrettaient que cette oeuvre puissante ne montre que des hommes brutaux et peu fréquentables. C'est ma foi vrai, mais cela ne m'a pas choqué, et j'ai noté que le film était dédié au père de la réalisatrice, mort en 2000. Un ex-cinéaste...
Papicha
Film algérien de Mounia Meddour (2019)
Il s'agit en fait d'une coproduction, avec également des financements français, belges et qataris. Mais qu'importe... ou plutôt tant mieux ! Sur la décennie noire, je conseille aussi Le repenti, mon premier film algérien. Si la condition féminine vous intéresse, Much loved (Maroc) ou La belle et la meute (Tunisie) peuvent vous reparler du Maghreb. N'oubliez pas Mustang pour la Turquie et Wadjda en Arabie saoudite !
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Ah ! J'ai oublié de parler du son...
Un beau travail a été réalisé sur ce point, avec des scènes "bruyantes" et d'autres plus calmes, tout aussi marquantes. Je n'en dis pas plus...
Mais si vous voulez aller plus loin...
Je ne peux que vous suggérer la lecture des avis de Pascale et Dasola.
Il paraît qu'à Alger spécifiquement, on appelle "papicha" une femme jeune, drôle et libérée. Ce n'est apparemment pas un terme péjoratif. Le film, lui, nous ramène au début des années 90. Un contexte historique important: à cette époque, alors que le gouvernement officiel vient d'annuler des élections donnant la victoire à des partis radicaux islamistes, le pays s'enfonce rapidement dans la violence. Les Algériens parlent d'une décennie noire: sans merci, la guerre civile qui commence causera la mort - ou la disparition ! - de dizaines de milliers de personnes. D'autres seront déplacées ou s'exileront. L'héroïne de Papicha, Nedjma, vit à la cité universitaire et travaille dur pour devenir styliste. Un drame soudain qui endeuille sa famille l'incite à se révolter: elle convainc ses copines d'organiser... un défilé de mode sur le campus ! Je vous laisse découvrir seuls ce qu'il advient de ce projet. Il est évident que sa mise en oeuvre n'a rien d'évident...
Autant le dire: même s'il donne à voir le fruit d'une belle solidarité entre filles, Papicha est bien un film dur, qui s'inspire de faits réels survenus en différents endroits et sans doute à plusieurs moments pour composer un récit unique. Souvent, ce récit prend aux tripes ! Deux des César 2020 l'ont récompensé: celui du meilleur premier film et celui (mérité) du meilleur espoir féminin, décerné à Lyna Khoudri. Cela dit, pour moi, c'est vraiment une réussite collective: l'actrice principale attire naturellement la lumière, mais ses partenaires de jeu font montre de talent aussi, dès lors que la caméra s'intéresse à elles. Il peut d'ailleurs arriver que tout s'emballe: la prise de vue "à l'épaule" vient amplifier le sentiment d'urgence et renforcer notre impression d'immersion dans le groupe - même si l'image est alors moins nette. Après la projection, j'ai vu que certains regrettaient que cette oeuvre puissante ne montre que des hommes brutaux et peu fréquentables. C'est ma foi vrai, mais cela ne m'a pas choqué, et j'ai noté que le film était dédié au père de la réalisatrice, mort en 2000. Un ex-cinéaste...
Papicha
Film algérien de Mounia Meddour (2019)
Il s'agit en fait d'une coproduction, avec également des financements français, belges et qataris. Mais qu'importe... ou plutôt tant mieux ! Sur la décennie noire, je conseille aussi Le repenti, mon premier film algérien. Si la condition féminine vous intéresse, Much loved (Maroc) ou La belle et la meute (Tunisie) peuvent vous reparler du Maghreb. N'oubliez pas Mustang pour la Turquie et Wadjda en Arabie saoudite !
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Ah ! J'ai oublié de parler du son...
Un beau travail a été réalisé sur ce point, avec des scènes "bruyantes" et d'autres plus calmes, tout aussi marquantes. Je n'en dis pas plus...
Mais si vous voulez aller plus loin...
Je ne peux que vous suggérer la lecture des avis de Pascale et Dasola.
Je n'ai pas trop aimé ce film.
RépondreSupprimerLa réalisatrice confond énergie et agitation. Je l'ai trouvé fatigant.
Et je n'ai pas été époustouflée par l'actrice, fatigante elle aussi.
Les hommes sont tous des abrutis et les filles sont renvoyées à la couture et à la superficialité d'un défilé de mode (ce pourquoi elles se battent). Je comprends qu'elles aient envie de se mettre en valeur sans risquer leur vie. Mais j'ai trouvé toute cette énergie gâchée pour un défilé... moche.
Une grosse déception pour moi face à l'enthousiasme sans réserve quasi général.
Dans « Viva Ladjérie » film franco Algérien tourné à Alger et sorti en 2004 , Nadir Moknéche nous brosse le portrait de 3 femmes algériennes prises dans le chaos d'une société en proie à la violence islamiste. La fantastique Biyouna joue le rôle d'une certaine « Papicha », ancienne danseuse qui vit dans le souvenir de sa gloire passée, et Lubna Azabal actrice belge joue sa fille . A rajouter à votre liste ….
RépondreSupprimer@Pascale:
RépondreSupprimerOui, j'ai vu que tu n'avais pas vraiment apprécié. Cela m'a surpris.
D'accord avec toi, cela dit, sur la vision des hommes un peu trop univoque.
Pour ce qui est de la couture, c'est le thème du film. Je n'ai pas été choqué.
Le défilé n'est pas très joli, OK, mais fait avec les moyens du bord, dans un contexte tendu.
@CC Rider:
RépondreSupprimerMerci d'évoquer Nadir Moknèche: j'en ai entendu parler, mais je n'avais pas la référence exacte.
Je ne sais pas comment on pourrait voir le film que vous citez, mais je vais tâcher de m'en souvenir.