Je vous parle assez régulièrement de mon association de cinéphiles. Parmi les nombreux films étrangers qu'elle propose, ceux qui viennent des États-Unis sont minoritaires: à peine trois sur les 65 que j'ai vus depuis mon adhésion en septembre 2014. Je crois pouvoir dire donc que Certaines femmes fera exception cette année, à plus d'un titre...
Je connaissais déjà la réalisatrice - Kelly Reichardt - et l'appréciais pour l'intelligence de son cinéma, orienté sur l'étonnante complexité des sentiments humains. Ici, comme le titre l'indique, la cinéaste construit un quadruple portrait féminin, qu'elle place entre les mains de Laura Dern, Michelle Williams, Kristen Stewart et Lily Gladstone. Leur très grand talent ne doit pas vous abuser: Certaines femmes tient de l'antithèse d'un film glamour. C'est une oeuvre contemplative et profonde, qui progresse lentement. Il s'y passe fort peu de choses. Attention: je ne veux pas dire qu'il n'y a aucune tension dramatique. Bien au contraire: jusque dans les silences, le scénario dit beaucoup !
Loin des grandes métropoles américaines, un premier long plan fixe donne le ton: un interminable train de marchandises traverse le cadre et nous transporte aussitôt au Montana, État pauvre de l'Amérique profonde, au nord-ouest du pays, l'un des moins denses en population. Seules 17 villes y dépasseraient aujourd'hui les... 5.000 habitants. Nous y rencontrerons ce que je pourrais appeler des oubliés du rêve américain, coincés dans des vies étriquées, sans grande perspective d'avenir. Face à ce constat, l'une des forces de Certaines femmes consiste à ne jamais sombrer dans le misérabilisme ou le jugement. La réalisatrice fait preuve une réelle empathie pour ses personnages.
Ils ne sont pourtant pas tous sympathiques, loin de là ! Je reviens sans délai sur ce constat: la caméra filme et nous laisse ensuite libres d'apprécier l'attitude des un(e)s et autres comme bon nous semble. Contrairement à bien d'autres oeuvres de cinéma, Certaines femmes expose clairement, mais ne surligne pas, laissant, je crois, la porte ouverte à différentes sensibilités pour bien interpréter son propos. Outre les remarquables interprétations, j'ai aussi apprécié la rigueur formelle du film, l'incroyable beauté de sa photographie et le brio avec lequel il a été monté (par Kelly Reichardt elle-même, d'ailleurs). Cela m'a aidé à traverser le récit, malgré ce que j'ai dit de sa lenteur.
Dois-je vraiment parler de récit, au singulier ? Les quatre héroïnes présentées à l'écran donnent lieu à trois histoires séparées, de fait. Certaines femmes n'est pas un film choral. Pourtant, les destinées qu'il esquisse sont celles de battantes. Elles se croisent, de manière claire dans l'une des sous-histoires, mais aussi par de petits détails répartis dans les autres. Une fois les boucles bouclées, le film propose encore des épilogues. Ils sont dispensables, peut-être. Je comprends toutefois qu'on puisse attendre un point final à ce qui est raconté. Pour ma part, je suis sorti de la salle comme j'y étais entré: ébloui par la toute dernière image. De quoi éveiller mon envie d'Amérique...
Certaines femmes
Film américain de Kelly Reichardt (2016)
Night moves, autre film récent, est moins puissant: je recommande plutôt La dernière piste pour entrer en matière avec la réalisatrice. Quelque part, son style me fait penser au cinéma de Michael Cimino. Un peu plus doux, c'est vrai, un gars comme Jeff Nichols brille aussi parmi les grands cinéastes de l'Amérique "ordinaire". Ces courants alternatifs témoignent la vigueur du septième art... et ça, c'est bien !
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Il semble que le film soit peu diffusé, mais...
Vous pourrez quand même en lire une chronique chez mon ami Strum. Pour un point de vue féminin, je vous renvoie également chez Dasola.
Loin des grandes métropoles américaines, un premier long plan fixe donne le ton: un interminable train de marchandises traverse le cadre et nous transporte aussitôt au Montana, État pauvre de l'Amérique profonde, au nord-ouest du pays, l'un des moins denses en population. Seules 17 villes y dépasseraient aujourd'hui les... 5.000 habitants. Nous y rencontrerons ce que je pourrais appeler des oubliés du rêve américain, coincés dans des vies étriquées, sans grande perspective d'avenir. Face à ce constat, l'une des forces de Certaines femmes consiste à ne jamais sombrer dans le misérabilisme ou le jugement. La réalisatrice fait preuve une réelle empathie pour ses personnages.
Ils ne sont pourtant pas tous sympathiques, loin de là ! Je reviens sans délai sur ce constat: la caméra filme et nous laisse ensuite libres d'apprécier l'attitude des un(e)s et autres comme bon nous semble. Contrairement à bien d'autres oeuvres de cinéma, Certaines femmes expose clairement, mais ne surligne pas, laissant, je crois, la porte ouverte à différentes sensibilités pour bien interpréter son propos. Outre les remarquables interprétations, j'ai aussi apprécié la rigueur formelle du film, l'incroyable beauté de sa photographie et le brio avec lequel il a été monté (par Kelly Reichardt elle-même, d'ailleurs). Cela m'a aidé à traverser le récit, malgré ce que j'ai dit de sa lenteur.
Dois-je vraiment parler de récit, au singulier ? Les quatre héroïnes présentées à l'écran donnent lieu à trois histoires séparées, de fait. Certaines femmes n'est pas un film choral. Pourtant, les destinées qu'il esquisse sont celles de battantes. Elles se croisent, de manière claire dans l'une des sous-histoires, mais aussi par de petits détails répartis dans les autres. Une fois les boucles bouclées, le film propose encore des épilogues. Ils sont dispensables, peut-être. Je comprends toutefois qu'on puisse attendre un point final à ce qui est raconté. Pour ma part, je suis sorti de la salle comme j'y étais entré: ébloui par la toute dernière image. De quoi éveiller mon envie d'Amérique...
Certaines femmes
Film américain de Kelly Reichardt (2016)
Night moves, autre film récent, est moins puissant: je recommande plutôt La dernière piste pour entrer en matière avec la réalisatrice. Quelque part, son style me fait penser au cinéma de Michael Cimino. Un peu plus doux, c'est vrai, un gars comme Jeff Nichols brille aussi parmi les grands cinéastes de l'Amérique "ordinaire". Ces courants alternatifs témoignent la vigueur du septième art... et ça, c'est bien !
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Il semble que le film soit peu diffusé, mais...
Vous pourrez quand même en lire une chronique chez mon ami Strum. Pour un point de vue féminin, je vous renvoie également chez Dasola.
Déjà repéré chez Dasola et Strum, et tu ne fais que confirmer ce que je pense : je veux absolument voir ce film ! Mais toujours pas de date de sortie chez nous. Je crois que je devrais patienter jusqu'à sa sortie DVD. Tu en parles très bien en tout cas :)
RépondreSupprimerMerci, m'dame !
RépondreSupprimerDésolé que tu ne puisses pas voir le film au cinéma. J'espère qu'une belle édition DVD récompensera ta patience.
Je suis en rage et ne comprends pas que ce film ne soit pas sorti chez moi alors que tous les autres films de la réalisatrice l'ont été.
RépondreSupprimerJe te recommande aussi le film ou Michelle Williams vit seule avec son chien... Le titre m'échappe... des prénoms je crois.
J'aurais revu Laura Dern avec plaisir. J'adore cette fille. Et je ne doute pas un instant de ce que peut faire Kristen la fascinante dans ce genre d'histoire.
La muse Michelle par contre a un petit air souffreteux systématique dans tous ses films (je me demande si cette fille a souri un jour) qui a un peu tendance à me porter sur les nerfs. C'est sûr que la vie sans Heath...
Je crois que pour une fois j'achèterai le DVD sans avoir vu le film au cinéma. Il faut juste que je ne le laisse pas échapper.
Bonjour Martin, le film est resté au moins 4 semaines à l'affiche dans un cinéma grand public à Paris. Il a rencontré un certain succès et c'est amplement mérité. Concernant le film dont le titre échappe à Pascale c'est Wendy et Lucy. C'est avec ce titre que j'avais découvert l'univers de la la réalitrice dont l'oeuvre sort des sentiers battus. Bonne après-midi.
RépondreSupprimerMerci Dasola. Je suis surtout en rage que ce film m'ait échappé. Parfois, j'ai envie d'étriper les exploitants de salle. J'ai raté Seul dans Berlin par exemple. Je sais qu'il n'avait pas une presse exceptionnelle mais j'avais tant aimé le livre ! En même temps... re-vivre à Paris : NIET !
RépondreSupprimer@Pascale 1:
RépondreSupprimerJe n'ai pas de réponse à cette question de la distribution du film. Désolé...
Comme je l'ai dit, toutes les actrices sont justes, dans ce film, les trois confirmées, mais aussi, "en bonus", ce qui aura été pour moi la révélation Lily Gladstone. Michelle Williams a une histoire intéressante, mais c'est celle qui m'a le moins plu, au fond. C'est vrai aussi qu'elle ne sourit pas beaucoup (peut-être pour la raison que tu énonces). Elle le fait ici, mais de manière assez fausse ou tout du moins gênée, sans doute. Son personnage ne vit pas non plus une partie de rigolade. Je n'en dirai pas plus.
Le DVD vaudra le coup pour une séance de rattrapage. Ou d'attrapage, donc.
@Dasola:
RépondreSupprimerQuatre semaines d'exploitation, c'est bien... ou même, c'est super !
Le truc, c'est qu'il y a tellement de cinémas à Paris que certains "osent" ce genre de diffusion.
Pour ma part, je compte beaucoup sur le cinéma où mon association se réunit. Mais il y a encore quelques films que je repère dans les sorties "françaises" et que je ne peux pas voir là où je vis...
Merci de ton aiguillage à Pascale vers "Wendy et Lucy". Je verrai bien, moi aussi, d'autres Kelly Reichardt !
@Pascale 2:
RépondreSupprimerTu le sais et le constatent comme moi: la distribution des films et leur exploitation posent un vrai problème. Je pense que beaucoup de gens ne s'en rendent même pas compte, en réalité. C'est inquiétant.
"Seul dans Berlin" est passé vers chez moi, mais je l'ai zappé: je n'ai pas eu envie d'entendre des Allemands parler anglais. Le livre devrait me plaire, cela dit.
Et bien je me rends compte que je n'ai encore jamais vu un seul film de Kelly Reichardt. En attendant son petit dernier, je vais me lancer dans "Wendy et Lucy" et "La Dernière Piste", que j'avais loupé pour je ne sais plus quelle obscure raison.
RépondreSupprimerNous aurons donc l'occasion d'en reparler ? Tant mieux !
RépondreSupprimerJe suis content que nous t'ayons convaincue de te remettre sur sa piste.
Le film est vraiment excellent. M'étonne pas car j'avais aimé Night moves et Old joy, très fins. Des femmes qui luttent, chacune à leur manière, qui vivent leur vie, et c'est pas facile. Bien loin de N.Y., de L.A. Comme tu l'a très bien dit, de petits tableaux d'une exposition qui ne nous assènent rien mais laissent ces quatre femmes à notre sagacité. A bientôt.
RépondreSupprimerJe l'ai vu.
RépondreSupprimerMerci la semaine Télérama.
Un GRAND film pour bien dormir...
La partie Kirsten est la plus intéressante et troublante. Et l'autre actrice un peu indienne m'a beaucoup plu.
Je suis fascinée par Laura Dern.
Michelle souffrote comme souvent, mais... cascade, sourit 2 fois.
Bref les actrices sont extras, les images magnifiques mais que c'est CHIANT.
Ton rêve d'Amérique n'en a pas pris un coup là?
Je ne devais pas être dans les bonnes dispositions...
Je ne ferai pas de note. Je sais que la vie est lente et répétitive souvent. Mais voir Flynn entrer et sortir de son enclos... 5 fois ? c'est bon on a compris.
J'ai besoin d'un peu plus d'âme au cinéma.
@Eeguab:
RépondreSupprimerRavi que tu partages mon enthousiasme, l'ami !
Il faudrait que je vois "Old joy", histoire de voir si je partage le tien.
En fait, j'aimerais voir l'ensemble des oeuvres de Kelly Reichardt, malheureusement difficilement accessibles.
@Pascale:
RépondreSupprimerChiant ? Je n'ai pas trouvé. Lent, ça, clairement, et répétitif, sûrement. Il faut s'accrocher et je peux comprendre que cela te paraisse trop appuyé. Mais, pour ma part, j'ai fini par oublier la caméra et j'ai vraiment pris plaisir à cette totale immersion. Comme si les personnages étaient réels, en fait.
Non, mon rêve d'Amérique n'en a pas pris un coup, au contraire.
Pas spécialement attiré par les States, je m'intéresse plus à ces petites communautés qu'aux grandes métropoles.
Je suis heureux malgré tout du bien que tu as pensé des actrices.
Franchement, cette scène nocturne à cheval entre Lily et Kristen, j'ai trouvé ça si beau.
Ah oui je me suis ennuyée.
RépondreSupprimerPar contre j'ai trouvé la balade nocturne ratée.
J'aime les films sur les campagnes américaines, beaucoup (Loving me vient à l'esprit). J'ai trouvé ce film froid alors que les 4 films sont incandescentes.
Les 4 FILLES.
RépondreSupprimerPourquoi ce con transforme fille en film alors que j'ai rien demandé.
@Pascale (ennuyée):
RépondreSupprimerJe comprends ton point de vue, même si je ne le partage donc pas.
Mais trouver les filles incandescentes et le film ennuyeux, c'est un peu paradoxal, non ?
@Pascale (correctrice de Coréen):
RépondreSupprimerIl se croit tout permis au seul prétexte que nous sommes sur un blog cinéma !
On s'en fiche: Laura, Michelle, Kristen et Lily, on les garde pour nous, et puis c'est tout !