Un accident de voiture qui laisse une femme défigurée, un suicide raté, deux autres réussis, deux viols et trois meurtres: on peut dire que Pedro Almodóvar n'a pas lésiné avec La piel que habito - La peau que j'habite, s'il faut le traduire en français. Vous pourriez me dire que le cinéaste espagnol ne fait jamais dans la dentelle. À chacun ensuite d'apprécier son travail en fonction de sa propre sensibilité...
Une fois n'est pas coutume: au départ, le réalisateur est allé piocher son idée de scénario dans la littérature. Le long-métrage est inspiré de Mygale, le polar d'un auteur français, Thierry Jonquet. L'action s'est déplacée jusqu'à Tolède pour l'adaptation cinématographique. Robert Ledgard, chirurgien plastique de bonne renommée, planche secrètement sur un projet fou: la création d'un épiderme humain artificiel, aussi souple que le vrai, mais beaucoup plus résistant. Derrière les murs de sa villa-clinique, il séquestre une jeune femme pour mener à bien ses expériences interdites. La piel que habito montre, contre toute attente, une cohabitation presque harmonieuse. Mais qui est donc Vera, cette jolie cobaye aussi docile qu'une souris de laboratoire ? Vous le saurez vite, mais je n'en dirai rien. Je trouve justement que le gros point faible de l'intrigue tient à sa résolution anticipée. Je dois admettre que j'aurais bien aimé frémir davantage.
Vous voyez la photo ? À la litanie des horreurs énoncée en ouverture de ma chronique, je peux ajouter un enlèvement ! C'est le point d'ancrage de la seconde partie du film, qui se déroule essentiellement sous la forme d'un long flash-back. Encore une fois, la seule chose vraiment frustrante, c'est que les divers morceaux du puzzle-scénario puissent si rapidement être associés. Une fois le fin mot de l'histoire connu, l'épilogue paraît un peu simpliste. Certains des personnages secondaires semblent même avoir été laissés sur le bord de la route. Reste que le tout est plutôt bien joué: Antonio Banderas est chaud comme un glaçon, Elena Anaya superbe et sensible, Marisa Paredes toute d'ambigüité contenue. Bon directeur d'acteurs, Pedro Almodóvar fait aussi, une fois encore, l'étalage de son talent graphique: le cadre et les décors sont de toute beauté, un vrai écrin pour les costumes signés Jean-Paul Gaultier. La piel que habito, un film qui a du style !
La piel que habito
Film espagnol de Pedro Almodóvar (2011)
J'ai découvert après coup que quelques idées du long-métrage venaient d'un conte d'Auguste de Villiers de l'Isle-Adam. L'érudition littéraire de Pedro Almodóvar se retrouve sans doute dans le soin apporté à la forme de ce long-métrage ambitieux, mais un peu froid. Je lui ai préféré Étreintes brisées, qui demeure ma référence absolue parmi ce que j'ai vu de l'enfant de la Movida. Une liste à compléter...
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Et maintenant, un tour pour lire ce que d'autres ont écrit...
En lice pour la Palme d'or en 2011, le film est rentré de la Croisette avec un Prix de la jeunesse. Il a aussi reçu quatre Goya, l'équivalent espagnol des Césars, et un BAFTA anglais du meilleur film étranger. "L'oeil sur l'écran", "Le blog de Dasola", "Mon cinéma, jour après jour" et "Sur la route du cinéma" font partie des sites qui en parlent aussi.
Une fois n'est pas coutume: au départ, le réalisateur est allé piocher son idée de scénario dans la littérature. Le long-métrage est inspiré de Mygale, le polar d'un auteur français, Thierry Jonquet. L'action s'est déplacée jusqu'à Tolède pour l'adaptation cinématographique. Robert Ledgard, chirurgien plastique de bonne renommée, planche secrètement sur un projet fou: la création d'un épiderme humain artificiel, aussi souple que le vrai, mais beaucoup plus résistant. Derrière les murs de sa villa-clinique, il séquestre une jeune femme pour mener à bien ses expériences interdites. La piel que habito montre, contre toute attente, une cohabitation presque harmonieuse. Mais qui est donc Vera, cette jolie cobaye aussi docile qu'une souris de laboratoire ? Vous le saurez vite, mais je n'en dirai rien. Je trouve justement que le gros point faible de l'intrigue tient à sa résolution anticipée. Je dois admettre que j'aurais bien aimé frémir davantage.
Vous voyez la photo ? À la litanie des horreurs énoncée en ouverture de ma chronique, je peux ajouter un enlèvement ! C'est le point d'ancrage de la seconde partie du film, qui se déroule essentiellement sous la forme d'un long flash-back. Encore une fois, la seule chose vraiment frustrante, c'est que les divers morceaux du puzzle-scénario puissent si rapidement être associés. Une fois le fin mot de l'histoire connu, l'épilogue paraît un peu simpliste. Certains des personnages secondaires semblent même avoir été laissés sur le bord de la route. Reste que le tout est plutôt bien joué: Antonio Banderas est chaud comme un glaçon, Elena Anaya superbe et sensible, Marisa Paredes toute d'ambigüité contenue. Bon directeur d'acteurs, Pedro Almodóvar fait aussi, une fois encore, l'étalage de son talent graphique: le cadre et les décors sont de toute beauté, un vrai écrin pour les costumes signés Jean-Paul Gaultier. La piel que habito, un film qui a du style !
La piel que habito
Film espagnol de Pedro Almodóvar (2011)
J'ai découvert après coup que quelques idées du long-métrage venaient d'un conte d'Auguste de Villiers de l'Isle-Adam. L'érudition littéraire de Pedro Almodóvar se retrouve sans doute dans le soin apporté à la forme de ce long-métrage ambitieux, mais un peu froid. Je lui ai préféré Étreintes brisées, qui demeure ma référence absolue parmi ce que j'ai vu de l'enfant de la Movida. Une liste à compléter...
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Et maintenant, un tour pour lire ce que d'autres ont écrit...
En lice pour la Palme d'or en 2011, le film est rentré de la Croisette avec un Prix de la jeunesse. Il a aussi reçu quatre Goya, l'équivalent espagnol des Césars, et un BAFTA anglais du meilleur film étranger. "L'oeil sur l'écran", "Le blog de Dasola", "Mon cinéma, jour après jour" et "Sur la route du cinéma" font partie des sites qui en parlent aussi.
J'ai revu il y a quelques semaines
RépondreSupprimer"les yeux sans visage" de Franju
Pedro a reconnu y avoir beaucoup pensé pendant le tournage de son film.
A l'inverse le fait de visionner à nouveau cet incontournable du genre, m'a fait oublier le travail du maitre espagnol.
Ce film m'a un peu déçue. Certes, je reconnais toujours une mise en scène impeccable, une musique fabuleuse, des acteurs très bons etc... Mais j'ai trouvé le traitement du sujet assez maladroit.
RépondreSupprimerCe n'est pas qu'un film de forme, un fait divers, une histoire aberrante, Almodovar me semble-t-il oeuvre par métaphore et fait ici aussi un film politique. Et les arts ! Les arts !
RépondreSupprimer@Benjamin:
RépondreSupprimerCe que vous dites peut être vrai. Je n'ai pas le souvenir précis du film, bientôt deux ans après. Il faudrait donc que je le revoie pour (peut-être) le réévaluer.
Au passage, bonjour à Tina et CC Rider, venus livrer leurs impressions à une époque où je ne répondais pas encore aux commentaires de mes lectrices et lecteurs...