Une chronique de Martin
Plusieurs motivations expliquaient mon envie d'aller voir Le tableau. Celle qui m'a vraiment conduit à aller au cinéma, c'est peut-être d'avoir un collègue de travail parent du réalisateur. J'avais l'intention d'en parler avec lui, ensuite, ce qui sera fait au moment où vous lirez ces lignes. En vous, s'il n'est pas trop tard, j'aimerais éveiller l'idée de m'imiter. S'il reçoit demain le César du meilleur film d'animation 2011, même si je n'ai vu aucun de ses concurrents, je serais content.
L'animation ne se réduit pas aux exploits techniques du duo Pixar/Dreamworks. Je vous encourage à porter le regard plus loin.
Le tableau, c'est ici celui d'un peintre qui a laissé son travail inachevé. Sur cette toile abandonnée cohabitent dès lors trois types de personnages: les Toupins, tout de couleurs vêtus, entendent dominer les Pafinis, créations incomplètes, et, nantis d'un complexe de supériorité, donnent la chasse aux Reufs, simples esquisses vaguement crayonnées. Face à l'intolérance, il faut donc un peu d'amour pour arranger la situation: en soi, la trame générale du film reste classique. Le grand talent de Jean-François Laguionie, réalisateur, et de sa scénariste Anik Le Ray est de nous donner à voir une jolie histoire, porteuse d'un message fort. C'est à chacun ensuite de chausser les lunettes qu'il veut pour garder ou non de la distance.
Une certitude, toutefois: il n'est nul besoin de lunettes 3D. L'émotion que procure ce petit film se passe largement de considérations technologiques. En fait, c'est bien à mes yeux la plus grande qualité du long-métrage: une bonne heure durant, on oublie totalement l'univers informatique de pointe qui fait le quotidien des oeuvres d'animation d'aujourd'hui, au profit d'une approche artisanale devenue rare sur les écrans. De par sa beauté formelle, Le tableau m'a semblé si humain que je me suis demandé si l'artiste à l'écran n'était pas tout simplement une sorte d'autoportrait du réalisateur. Au moment du générique final, j'ai en tout cas eu envie d'en savoir plus. Et ça, c'est souvent pour moi le signe du plaisir pris au cinéma.
Le tableau
Film français de Jean-François Laguionie (2011)
Pour une fois, je vous encourage vraiment à aller découvrir le film sans référence particulière. Je n'avais vu de ce même réalisateur qu'un court-métrage - qu'il me faudrait peut-être d'ailleurs présenter aussi, à l'occasion. Bien que numérique, l'univers qu'il a composé s'apparente vraiment à une oeuvre d'art telle qu'on en admirerait dans un musée imaginaire. Je crois n'avoir rien vu d'aussi touchant depuis mes premiers Miyazaki. Une forme de poésie à l'état brut.
Je l'aurais bien vu celui-là, je suis passé à côté...
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