samedi 22 janvier 2022

Juan et John

Au soir de la dernière Saint-Sylvestre, j'ai tenu à terminer l'année avec un grand classique du cinéma - un choix validé par mes parents. J'ai décidé de regarder Il était une fois la révolution, qu'on présente comme l'ultime western de Sergio Leone (ce qui m'interroge un peu). Autant le dire illico: le maestro italien m'a une nouvelle fois ré-ga-lé !

Il était une fois la révolution
nous emmène au Mexique, vers 1913. Aux heures d'une impitoyable guerre civile, le hors-la-loi Juan Miranda tire ses marrons du feu comme pater familias d'un groupe criminel adepte des attaques de diligences. Un beau matin, miracle: un hasard malicieux place sur sa route un dénommé John H. Mallory, Irlandais spécialiste des explosifs en tous genres ! Une vraie bénédiction ! Après quelques péripéties, les deux hommes s'associent de bon coeur sur la foi d'un idéal commun et, surtout, dans l'idée que leurs talents combinés pourraient les aider à devenir riches sans trop se fatiguer. En réfléchissant un peu, on trouvera toujours une banque à braquer...

J'ai lu une chose que je trouve très juste: chez Sergio Leone, le trivial côtoie toujours le lyrique. En clair, ses personnages emblématiques agissent souvent comme des sagouins, mais dans un contexte historique dessiné avec une rigueur beaucoup plus froide. Mon film d'aujourd'hui ne fait pas exception: Il était une fois la révolution relate les aventures picaresques de deux hommes hauts en couleurs et, dans le même temps, évoque un Mexique soumis aux exactions d'un dictateur sanguinaire. Après une première partie assez rigolote destinée à camper ses deux principaux protagonistes, le scénario renverse la table et la comédie devient presque un drame implacable !

Il était une fois la révolution
est aussi traversé par la mélancolie. Alors qu'il est question de bâtir un autre avenir, quelques séquences muettes évoquent le passé d'un des deux héros et nous expliquent pourquoi celui-ci est tellement exalté à l'idée de bousculer l'ordre établi. Simultanément, le film nous montre combien il est difficile d'aller jusqu'au bout de ses rêves et nous annonce que le prix à payer est le plus souvent exorbitant, parce que lié aux illusions perdues. D'ailleurs, en citant Mao Zedong, Sergio Leone le rappelle dès le début de son film: "La révolution est un acte de violence". Démenti cinglant à ces braves innocents qui espéraient encore finir les mains pleines...

Heureusement, pour adoucir les moeurs et peut-être aussi atténuer quelque peu la dureté du monde, il reste la musique. Les tribulations de ces types ordinaires devenus des libérateurs sans l'avoir voulu n'auraient pas cet impact émotionnel si elles n'étaient pas sublimées par les magnifiques mélodies d'Ennio Morricone. Parfait complément d'une mise en scène flamboyante, les notes du grand compositeur romain vibrent comme jamais, tout au long de scènes d'une beauté sidérante. Mention spéciale pour celle qui, de nuit et sous une pluie battante, vient révéler une trahison à laquelle je n'osais pas croire. Conclusion: Il était une fois la révolution demeure un film IMMENSE !

Il était une fois la révolution
Film italien de Sergio Leone (1971)

J'ai déjà dit beaucoup de choses dans cette chronique et je suppose que mes étoiles sont tout aussi explicites pour témoigner du plaisir que j'ai ressenti à la (re)découverte de ce bijou à l'éclat inaltérable ! Difficile de lui trouver un équivalent: un film comme El mercenario parle du Mexique et me plaît beaucoup, mais pour son aspect ludique. Côté fresques à l'italienne, j'admire aussi 1900 - sur un autre sujet...

----------
Pour aller plus loin, j'ai d'autres références...

Vincent n'a pas hésité à aborder le film à deux reprises: ici et . Envie de poursuivre encore ? Strum et Lui en ont également fait écho.

12 commentaires:

  1. J'ai vu « la révolution » en salle à sa sortie et de nombreuses fois depuis, ce monument se trouvant en bonne place dans ma vidéothèque... Je le considère avec « El chuncho » de Damiani comme l'un des sommets du « western Zapatta » très à la mode à la fin des années 60. De nombreuses similitudes sont d'ailleurs à noter , entre les deux films notamment dans la « peinture » si réaliste du Mexique en proie à la misère et au chaos ou le picaresque et le drame se conjuguent si parfaitement.

    Enfin une particularité , moi qui suis un inconditionnel de la VO , « la révolution «  est peut être le seul film étranger que je préfère dans sa version française....

    RépondreSupprimer
  2. Chang chang chang...
    Cette musique, cette histoire, ces personnages ! L'amitié, la trahison, la révolution. Oui ce film est sublime et peut-être meilleur qu'Il était une fois dans l'ouest.
    Je vois bien cette scène terrible sous la pluie et celle dans le pub en Irlande.
    Et l'interprétation exceptionnelle des 2 larrons. Rod Steiger qui devient un héros. C'est d'une beauté ce film !

    RépondreSupprimer
  3. @CC Rider:

    Sur grand écran et sans trop d'info préalable, ça doit être absolument superbe !
    Vous placez "El chuncho" dans la même cour ? IL faut que je trouve un moyen de le voir...

    Une question que je me pose: y a-t-il vraiment une version originale ???

    RépondreSupprimer
  4. @Pascale:

    Je ne suis pas surpris de ton amour pour ce film. C'est le contraire qui m'aurait étonné ! Rod et James sont parfaits... et j'ai vraiment beaucoup aimé le côté "armée mexicaine" du film. C'est idéal.

    En revanche...
    ATTENTION SPOILERS !!!
    ...

    Je vous aurai prévenus, les autres !!!
    ...

    C'est pas "Sean, Sean, Sean", plutôt ? On n'est pas au Tibet avec Tintin !

    RépondreSupprimer
  5. A la lecture du titre et j'ai immédiatement la musique en tête !
    Un MONUMENT (sans Valley) du western :)

    RépondreSupprimer
  6. Oui ! Bien évidemment !
    Associer immédiatement la musique d'Ennio Morricone aux images de Sergio Leone, quoi de plus naturel ?

    RépondreSupprimer
  7. Je l'ai vu en version italienne (Giu la testa) et en version anglaise (Duck you sucker) aussi intitulé (A fistfull of dynamite) allusion évidente à la série des dollars ….

    Concernant El chuncho vous trouverez une version anglaise sur Youtube sous le titre « A bullet for the general » ...de très bonne qualité

    RépondreSupprimer
  8. Oui, j'avais connaissance de ces différents titres internationaux. La France joue sur l'idée de continuité. Et merci pour l'info. Je verrais bien "El Chuncho", mais j'ai du mal à écouter Gian Maria Volontè parler anglais...

    RépondreSupprimer
  9. Non, plutôt chong chong chong en fait.
    Très net à 1 minute... :-)
    https://youtu.be/jUigyURRCC8

    RépondreSupprimer
  10. Je ne suis pas sûr que cette musique soit celle du film... et pas une reprise !

    Mais bref... parfois, Ennio Morricone avait aussi le talent de nous faire entendre des trucs autres que ceux qu'il avait réellement composés. Exemple: de la thérémine là où, longtemps, j'ai cru écouter une voix de femme...

    RépondreSupprimer
  11. Sean..., Sean, Sean..., Sean, Sean... une musique immortelle de Morricone pour un Leone que je préfère à ses autres westerns : plus profond et plus émouvant. Un film formidable. Pas vu El Chuncho non plus et du coup le commentaire de cc rider m'en donne également l'envie ! Merci pour le lien Martin.

    RépondreSupprimer
  12. Tu as raison: c'est un film plus profond et plus émouvant que les autres. Curieusement, j'ai encore du mal à le placer dans la case "western". Peut-être pour cette même raison, justement...

    "Le bon, la brute et le truand" contient certaines thématiques en germe et reste ma Madeleine leonienne parce que partagée avec mon père autour de notre vieil ami Clint.

    RépondreSupprimer